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[RP] La Dagyde, herboristerie

--Mougeotte


~~Ruelles crasseuses de Poitiers~~

Poitiers et ses bas fonds à peine fréquentables, des ruelles étroites et nauséabondes où toute la vermine de la ville se regroupe. Au milieu de cette fange humaine vit la Mougeotte, rebouteuse, herboriste de son état et plus officieusement à ses heures perdues, sorcière ...
Au détour d'une venelle, grince la pancarte de son "officine". Vitres crasseuses qui laissent à peine entrevoir l'intérieur de la boutique. Et contrairement à ce que l'on pourrait croire, tout y est propre et bien tenu. De grandes étagères où trônent foule de bocaux aux contenus les plus étranges ... Allant du visqueux, au coloré suspect en passant par ce qui ne laisse aucun doute quant au contenu, tels les yeux de moutons,araignées, pattes de grenouilles et autres crêtes de poulets.
Face aux étagères, une ribambelle de boites remplies de plantes médicinales ou toxiques, voire même mortelles. Toutes soigneusement répertoriées et étiquetées. Pièce au plafond bas et au plancher vermoulu, craquant au moindre pas. Et pour tenir cette "ravissante" boutique, notre fameuse Mougeotte.

Vieille femme taciturne au regard vert et pénétrant, malgré un début de cataracte, les cheveux gris virant au jaune pisse. Longue filasse qui lui descend sur les épaules. Toujours vêtue de sombre, les doigts tout aussi crochus que les griffes qui les prolongent. Le visage ridé par l'âge, les yeux cernés et rougis par la fumée de l'encens qui brûle constamment dans l'arrière boutique, diffusant son odeur âcre si caractéristique.
Tout le monde ici la connait, aussi bien pour les maux qu'elle est capable de soulager que pour ceux qu'elle pourrait infliger si on lui cherchait des noises ... Au fil des années, elle avait su assoir sa réputation et être relativement tranquille. Assise derrière son comptoir, elle s'attelait à fabriquer une dagyde en toile de jute, l'un de ses produits couramment demandé. Bien que la religion officielle trouve cette pratique hérétique, la proximité de la Bretagne et des bribes de druidisme lui permettaient d'avoir un travail conséquent.
Cymoril
Nouvelle traversée du marais poitevin pour la demoiselle. Pas que ça l’enchante, surtout que c’est long et monotone, voir très long et très monotone… Aux plaines succèdent d’autres plaines, entrecoupées par de rares massifs boisés, pour tomber ensuite sur des bocages.. Certes la charrette avance sur un rythme fluide et ininterrompu.. mais c’est d’un ennui.

Aussi quand l’occasion se présente d’aller se dégourdir les pattes, on la voit qui s’engouffre dans les ruelles, laissant les rumeurs du marché venir à elle, la bourse sonnante contre sa cuisse alors qu’elle cherche un truc à offrir à une mioche, qui doit ruminer d’avoir été l’oubliée du voyage. Les tissus lui semblent corrects, mais le temps manque pour faire couper une nouvelle robe. Et surtout, elle tient à innover… Peu à peu, le cœur sombre de la ville vient étouffer les bruits, alors que ruelles et venelles se font plus sinueuses, tortueuses. Pas tout à fait perdue, mais sans plus trop savoir où elle est non plus, sans prêter réelle attention à la faune locale, avançant toujours plus, cheveux retenus dans une lourde natte qui venait caresser ses reins, la petite demoiselle déambulait pif en l’air, le regard vague sans voir personne.

Jusqu’à ce qu’elle marque un arrêt, en pâle imitation d'un setter irlandais à l'occasion d'une chasse. Délicates effluves qui venaient chatouiller ses narines, et un sourire discret de se dessiner lentement sur son minois. Reprise de l’avancée, au pif justement. Suivre ces senteurs et atteindre ce qui est pour elle une caverne d’Ali Baba, sans les quarante voleurs.. La porte est poussée, sans empressement, et sitôt à l’intérieur et avant même d’ouvrir la bouche, les yeux s’illuminent sur les rayonnages comme une gosse devant l’étal d’un pâtissier le dimanche à la sortie de la messe. Avant de lâcher un :


Bonjour…

Trainant, alors que déjà ses mains effleurent les pots étiquetés et que son esprit se met à cogiter à toute allure.
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--Mougeotte


Les doigts perclus d'arthrose déformante vont et viennent avec une rapidité étonnante, l'habitude de manier l'aiguille sans doute. Les gestes se font par automatisme. Plongée dans son occupation, elle ne relève la tête qu'au tintement de cloche qui retentit alors que la porte s'ouvre, laissant s'engouffrer une vague de froid. Les yeux se plissent comme pour faire la mise au point sur la donzelle qui vient de pénétrer dans son antre. Elle la détaille du regard. Petite, taillée à la hache dans un tibia de sauterelle, le teint pâle, seule la proéminence de ses seins clochait dans le tableau de la brindille. Légèrement armée. Il ne faisait aucun doute que cette dernière savait s'en servir.

Mais surtout, il y avait ce regard qui ne trompait pas, deux noisettes rondes et pétillantes scrutant les étagères, ses doigts caressant les contenants comme d'autres le feraient sur un objet de valeur, avec amour ou convoitise. Et en réponse à la salutation de la visiteuse, la bonne Mougeotte lui répond dans son patois poitevin.


Bunjhor mademoeséle,
I'pevoer t'y p'tet v'aspiràe ?*


Bon c'est un patois un peut à ma sauce ^^ mais grossos mod voilà ce que cela voudrait dire :

* Bonjour mademoiselle,
Je pourrais peut-être vous aider ?
Cymoril
Et quelques murmures pour elle, au fil des découvertes, ponctuant sa réflexion de Oui… et ça aussi…, s’arrêtant net en entendant la voix de la vieille femme. Les yeux pétillants d’envie, elle avance d’un pas, et après un plissement de nez signe d’un effort nuancé dans le choix des mots :


Je voudrais…


Une pause est marquée. Le temps d’organiser le sens des priorités et de ne rien oublier, les noisettes reparties courir sur les pots et fioles…


Vous me conseillez quoi comme yeux… C’est pour offrir… à une passionnée… de cinq piges…


C'est lâché avec le même naturel qu'elle demanderait une miche chaude au marché.
Oui. La Fourmi est une mère de substitution aimante et attentive aux désirs et aux goûts de Zodel. Elle l’imagine déjà, serrant le bocal contre son cœur le soir en s’endormant, ou glissant ses doigts dedans pour jouer avec, en extraire un et s’entrainer à la dague.



Les yeux de triton me semblent bien…


Si elle accepte le conseil, elle évitera toutefois de se faire berner et refiler des trucs conditionnés dans de mauvaises conditions. Rien de pire qu’une odeur de putréfaction pour vous gâcher la joie d’un présent offert.


Et il me faudrait aussi un filtre.. pour une vicomtesse qui n’arrive pas à conserver ses promis jusqu’à la noce…


Priorités lancées. Elle repart en direction des étagères, toujours en quête de nouveautés. Ou pas. P’têt simplement renouveler ses réserves qui tendent à fondre à vue d’œil. Coin épices et graines… Le regard se pose et le sourcil se hausse…
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--Mougeotte


Elle ne s'y était donc pas trompé, la donzelle était connaisseuse et sa demande ne la choqua pas outre mesure quand elle appris la destinataire du présent.

Lés élls de aspissour, o idéyàu raport à oune frispoulét ! Avisàe cheu, tote prmàe calitous ! *

Elle sort de derrière son comptoir en claudiquant, puis sans même regarder l'étiquette du bocal, elle en prend un au milieu des autres et l'agite sous le nez de la cliente.

Argardàe dun coume i étre bea é lusent ! Cunbén i v'en boutre ? **

Alors sous les noisette de la donzelle, une multitude de petites billes visqueuses roulent dans le bocal. Puis s'arrêtant un instant devant son étagère, la seconde main crochue attrape un autre bocal qu'elle présente à sa cliente.

I v'cunsellàe étou lés élls de chipirole. ***

Attendant réponse, elle retourne à son comptoir, poser les deux bocaux. Se tourne vers l'autre étagère en se grattant le menton. Concentrée et en pleine réflexion, elle cherche ce qui pourrait convenir à l'autre demande de la donzelle. Pour elle même au départ, elle prononce quelques mots :

I trouàe. De l'hypomane(1) ! Vela çhau qu'i faulut ! ****

Elle lui explique alors comment utiliser ce sésame, l'excellence même des philtres d'amour. L'oreille attentive, la cliente n'en laisse pas moins ses yeux continuer de courir sur les mille et un trésors de la petite boutique.

* Les yeux de triton c'est idéal pour une gamine ! Regardez ça, toute première qualité !

** Regardez comme ils sont beaux et brillants ! Combien je vous en mets ?

*** Je vous conseille aussi les yeux de seiche.

**** J'ai trouvé. De l'hypomane ! Voilà ce qu'il faut !

(1) A l'avant du front d'une jument, on trouve fréquemment une masse charnelle qui disparaît plus tard, une sorte de muscle frontal, déjà connu des anciens qui l'avaient surnommé " hypomanes ". Cette pièce est infiniment efficace pour l'enchantement amoureux et devra être soigneusement découpée avec un couteau tout neuf, de sorte qu'il n'y reste ni peau, ni nerfs adhérents. On le met ensuite dans un pot émaillé, et on la laisse sécher dans un four, une fois le pain retiré. En la portant ensuite sur soi et en la faisant seulement toucher par la personne en question, celle-ci brûlera d'un amour violent pour le propriétaire de cette recette. Mais si l'on réussit à faire avaler à la personne une petite partie de ce remède mélangé aux aliments ou à la boisson, l'effet est d'autant plus certain. Et comme le vendredi est placé sous le signe de Vénus, il est judicieux de choisir ce jour pour l'essai.
Cymoril
Si dans une certaine mesure elle maîtrise l’art d’user des simples et autres pharmacopées plus ou moins recommandées, il lui faut un effort notable pour la compréhension de la vieille. Patois et accent à couper au couteau, elle a beau passer sa vie sur les routes, elle a du mal. L’air de rien, la tête s’ébroue comme pour en dégager les fourmiesques esgourdes. Avant d’opiner du chef, concentrée sur les pots finalement plus que les propos, identifiant les contenus à mesure qu’ils se présentent. Une moue encore plus concentrée s’affiche sur son visage. Triton, seiche, seiche, triton…

Vous pourriez me faire un mélange des deux, comme ça la môme aura de quoi s’amuser et s’instruire un peu en même temps ? Dans un petit bocal.. joli…


Et de sourire. C’est pour un cadeau, faut soigner la forme. La première impression est toujours importante, et faudrait pas que Zodel soit déçue. Ca l’emmerderait clairement.
Avant de poursuivre sur le remède miracle pour la vicomtesse. Dubitative. Ca lui parait un peu compliqué et elle imagine mal Tiss portant un morceau d’animal mort sur elle qui ne soit pas une fourrure et demandant à un hypothétique amoureux d’y toucher.. Haussement d’épaule léger.



N’auriez rien de plus… simple à l’usage ? Parce que bon.. comme cadeau.. c’est assez peu présentable…


Au pire la vieille lui présente un élixir comme tout bon charlatan a en magasin, et elle prend le tout. Un pour l’emballage l’autre pour… qu’elle y croit. Finalement c’est surtout d’espoir qu’elle a besoin la Reikrigen. Un coup de pouce pour avancer. Même si une certaine paire de bourses serait plus appréciée, on fait avec ce qu’on a…


Me mettrez aussi du gingembre… de la jusquiame noire… de la bourse à pasteur… de la grande consoude… N’auriez pas un peu de chanvre qui traine ?


Un genre de tout en vrac, mêlant tous les genres. Parce qu’elle prévoyante aussi… Revenant à la vieille et à son histoire de barbaque à faire sécher, porter et faire consommer, souriant en imaginant malgré tout la vicomtesse désespérée au point de se résoudre à ce genre de sornettes… Et d’attendre sagement…
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--Mougeotte


Elle acquiesce à la demande la donzelle et repasse derrière le comptoir, sortant d'un tiroir un petit pot en terre rehaussé d'un émail de Limoges qui représente une petite fleur aux pétales roses. Elle en soulève le couvercle et y verse tour à tour des yeux de triton et des yeux de seiche. Celui-ci bien rempli, à moitié d'une sorte et à moitié de l'autre, elle le referme et le scelle d'un joli ruban de soie vert d'eau.

Coume çheù-lae, çheu v'alàe ? *

Alors qu'elle était entrain de faire le "paquet" pour la curieuse gamine aux goûts visiblement étranges, elle masqua sa contrariété quand au refus du philtre suggéré.
C'est qu'elle n'avait pas pour habitude de vendre de la camelote ! Contrairement à certains autres du métier ... C'est aussi pour cela qu'elle exerçait toujours et qu'elle avait la réputation chevillée au corps.
Attendant donc l'aval de sa cliente, ses yeux parcouraient le rayonnage dédié aux philtres d'Amour. Efficace et facile d'utilisation ... Le regard légèrement vitreux s'éclaire alors, la main se tend et sort un petit pot qu'elle présente à la donzelle.


I trouàe. De la pouvre de sourit-chàude (2) ! **

Le petit pot à la main, elle lui explique qu'il suffit d'en saupoudrer, discrètement, une petite pincée sur l'épaule de l'homme convoité pour que celui-ci soit envoûté. Simple et discret ! La laissant réfléchir, elle pose le pot sur le comptoir et en fait le tour, armée d'une pelle creuse en bois et de petites bourses en cuir très fin qu'elle va remplir les unes après les autres des différents remèdes demandés.

Dau charve obe daus charvoes ? I avoer étou de l'arbe-de-la-remise. ***


* Comme cela, ça vous va ?

** J'ai trouvé. De la poudre de chauve-souris !

*** Du chanvre ou des graines de chanvre ? J'ai aussi de l'armoise.

(2) Cendres d’une chauve-souris incinérée par les bons soins d’une «sorcière» de village

Cymoril
Un sourire satisfait s’affiche en douceur sur le minois de la Fourmi en voyant le paquet de Zodel s’orner d’un charmant ruban. Priorité numéro une… Fait.
L’esprit ailleurs, occupé sur les rayonnages elle acquiesce mollement sur la poudre de chauve souris.. Chauve qui peut même.. La vicomtesse ferait avec… Ou pas. Parce qu’il est des choses pour lesquelles on ne peut rien finalement… Et elle ponctue, rassurante :


Je prends le tout..

Parce que quand même… Pas question de lésiner. Des fois que ça marche et que ça lui rende un peu le sourire. Même un bourrin ferait l’affaire pour le coup.
Elle se reconcentre, tentant de piger ce que la vieille lui raconte, antennes frétillantes. Et résiste mal à la tentation…


Chanvre.. pas de graines… et mettez de l’armoise aussi…

La ruine c’te boutique…
Pire que les tailleurs parisiens. Et elle n’a pas encore fini.Une idée lui trotte dans la tête. De ces idées qui vous semblent un peu, beaucoup… fourmiesques. Une main va fouiller dans sa lourde besace, et en extrait des menottes, les laissant balancer négligemment au bout des doigts…


Vous auriez quelque chose pour aller avec ça ?

Comprendre, vous auriez quelque chose qui me permette de passer ça à quelqu’un sans manger une mandale ? Et le sourire de s’élargir, l’air naturel et dégagé. Fourmi quoi…

Pavot noir et valériane… vous en pensez quoi ?

Parce qu’elle a quand même de sérieuses bases notre éternelle étudiante.
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--Mougeotte


Un léger sourire s'esquisse sur les lèvres de la vielle herboriste, accentuant ses rides profondément creusées. La cliente était fine connaisseuse, elle aurait sans doute même pu tenir sa propre boutique. Elle savait ce qu'elle voulait et ce qu'elle en ferait. Le chanvre est mis lui aussi dans une petite bourse de cuir, bien fermée.
La jeune femme semblait vraiment dans son élément au milieu de toutes ces substances parfois (souvent ?) dangereuses ...

Une main fouille dans sa besace pour en sortir une paire de menottes, cliquetant doucement au bout de l'index tendu. Les sourcils grisonnants se froncent à la curieuse demande, mais après tout une fois les plantes sorties de chez elle, elle en avait cure de savoir à quoi elles serviraient ... A l'énumération de la cliente, un seul mot franchit les lèvres de la Mougeotte :


Mandragore ?

Les deux billes vertes étincellent alors d'une lueur étrange. La mandragore ... Et tout l'occulte que cette plante suggère ... Léger frisson qui parcourt le dos de la "sorcière" ... Bien longtemps qu'elle n'a pas pratiqué le rituel du sabbat ... Secouant légèrement la tête, elle reporte son regard sur sa cliente pour connaitre son avis.
Cymoril
Un sourcil se hausse… alors qu’elle passe en revue dans sa tête toutes les propriétés de la racine… Si elle est versée dans l’usage des plantes à visée médicale, et bien qu’elle en use pour s’assurer une certaine sérénité nocturne, elle donne assez peu dans les croyances magiques des plantes… Le tri est vite fait… Mais l’intérêt est là… Eveillé… Fourmi toujours en quête de connaissances nouvelles ne pouvait que mordre à l’hameçon.

Pourtant elle temporise, feignant l’indifférence, que l’habile commerçante ne croit pas avoir gagné trop vite non plus.
Changement de sujet. Ou comment une conversation dérangeante revient à la mémoire fourmiesque… et une nouvelle idée de cadeau… pour une morue spécialiste en paumage de gosses qui veut lui piquer sa môme…



Hum…

Sauriez vous préparer un onguent au Sourcil de Vénus* et à l’ortie brûlante ?



Mais qu’il sente bon !



C’est aussi… pour offrir.



Et le sourire de se faire légèrement carnassier.
Tout se paye... Si la demoiselle est de nature douce et gentille, son inclination ne la porte toutefois pas à tendre l’autre joue.
Un regard légèrement assombri reprend son exploration, alors qu'une main fine replace lentement une mèche derrière l'oreille




*Un des nombreux noms de l’achillée millepertuis.

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--Mougeotte


Les yeux se plissent légèrement, elle sait qu'elle a touché la corde sensible de sa cliente en évoquant la légendaire racine ... Alors que l'accord n'est pas conclu pour autant, puisque la donzelle n'a ni acquiescé ni refusé, la vieille herboriste se baisse avec lenteur sous le comptoir. Bruit de clef dans une serrure grinçante, témoin que celle-ci ne sert pas souvent, fin grincement et le bruit de flacons qui s'entrechoquent. Nouveau bruit de clef, la vieille hirsute se relève dans un léger grognement. Avec l'âge, les articulations ne sont plus ce qu'elles sont ...
Et la main crochue de déposer devant elle une petite fiole aux reflets ambrés, tout cela sans qu'un mot ne soit prononcé.
Chose faite, elle reporte son intérêt sur la nouvelle demande de la brindille brune. Un sourcil se hausse à l'étrange demande. C'est qu'elle doit avoir pas mal d'ennemis la p'tite !


I v'facciun çheù-lae tot-cort. *

Et la vielle s'active alors, sortant au préalable les ingrédients demandés, puis elle passe dans l'arrière boutique, pots à la main. Dans un creuset qu'elle place au dessus du feu, elle dépose une grosse cuillère de cire d'abeille qu'elle laisse fondre et à laquelle elle ajoute un peu d'huile d'olive, touillant le tout pour créer un mélange homogène. Ensuite avec précaution, elle ajoute une once(1) de sourcil de Vénus et un sextant(2) d'ortie brûlante. Une fois le tout bien brassé, elle y verse quelques gouttes d'essence de rose et de jasmin. Puis elle retire le creuset du feu et verse le liquide dans un pot pour qu'il se solidifie en refroidissant. Tenant le pot à l'aide d'un tissus épais, elle retourne en boutique et le dépose sur le coin du comptoir pour en faire respirer les fragrances à son acheteuse.

çheù-lae v'avéndre t'i ? **


* Je vous fait cela tout de suite.

** Cela vous convient-il ?

(1)L'once est une ancienne unité de masse, encore utilisée dans certains pays, dont la valeur est comprise entre 24 et 33 grammes.

(2)Le sextant : double de l'once

Sources => http://raf.lesroyaumes.com/index.php/De_la_valeur_des_poids_et_des_mesures_employ%C3%A9s
Cymoril
Et le retour du patois qui lui arrache le tympan.
Vivement que quelqu’un impose une uniformisation linguistique. Elle se contente de hocher la tête et de suivre discrètement la vieille femme. Appuyée contre l’encadrement de la porte de l’arrière boutique, elle observe les gestes restés sûrs malgré les ans, vérifiant sans en avoir l’air les produits employés…
Elle a bien vu le drôle d’air sur le visage ridé, et se doute des pensées qui peuvent venir à l’esprit initié. Un sourire discret se dessine à nouveau sur son visage… Offrant à nouveau l’illusion à fronder. D’une sérénité froide en carapace fourmiesque, concentrée sur les mains qui s’activent à la préparation demandée. Un léger éclat brille dans les prunelles quand elle passe, fumante, dans le pot, et la demoiselle de devancer la rebouteuse au retour dans la boutique. Lui laissant tranquillement déposer son œuvre sur le comptoir avant d’aller en cueillir les senteurs…


Bien… très bien…

Bon, maintenant faut attendre que ça refroidisse. Sans avoir l’air empressée évidemment… Ni trop porter attention à la fiole restée en attente.. Une main se pose sur le bois que les doigts se mettent à tapoter doucement, alors qu’elle reprend un air concentré en balayant une nouvelle fois les étagères des yeux… Revenant à sa priorité première. La môme. Et si.. Les noisettes se sont arrêtées sur les pattes de poulet. Elle envisage, mais trouvant ça un peu trop commun, demande à tout hasard :

N’auriez rien de plus.. imposant ? C’est pour monter sur un bâton.. pour la mioche…

Rhalala Zodel, petite Zodel, douce enfant… que ne ferait-on pas pour que t’amener à de prendre un bain…
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--Mougeotte


La donzelle semble satisfaite du savoir-faire encore intact de la vieille herboriste. Revenues en boutiques, la Mougeotte laisse sa cliente à ses réflexions, attendant la prochaine demande, qui l'étonnera sans doute tout autant que les précédentes.
D'ailleurs celle-ci ne tarde pas à franchir les lèvres pâles de la silhouette fine. Main qui se pose sur le menton, cherchant de quoi satisfaire les lubies abracadabrantes ...

C'est sans un mot que la vieille passe de l'autre côté du comptoir, suivant le rayonnage des yeux, une fois repéré l'endroit voulu, elle s'accroupit et ouvre un grand tiroir en bas de l'étagère. Elle y farfouille un moment, ouvrant un à un des morceaux de tissus renfermant mille et un objets étranges ... Enfin, elle trouve ce qu'elle avait en tête et sort triomphalement un tissu soigneusement plié. Tiroir refermé du pied, elle dépose le paquet sur le comptoir et prenant la toile par les pans, dévoile à la vue de la donzelle le trésor qu'il renferme.


In piote de blléràu, çheù-lae v'avéndre t'i ? *

Un sourire étrange flotte alors sur les lèvres ridées de la vieille, laissant tout le loisir à la chalande de se délecter de la vision de l'imposante patte griffue et poilue. Une telle "pièce" ne peut qu'exaucer le souhait excentrique.

* Une patte de blaireau, cela vous convient-il ?
Cymoril
Et le sourire de s'étirer plus longuement. Satisfaite la fourmi, avec ses lubies.. acadabrantesques. Elle imagine la môme, portant fièrement sa lance-patte de blaireau en avant, menaçant les enquiquineuses en taverne, griffant le premier qui voudrait regarder de trop près ses dents de lait...

Parfait ! Vraiment...

Sait-on jamais si à force de compliments, non feints d'ailleurs soit dit en passant, cela aboutissait à une ristourne...
Le regard retourne au comptoir, faisant l'inventaire de sa commande, s'interrogeant déjà sur l'onguent... Elle remet à plus tard le débat entre sa conscience et ses motivations, préférant se concentrer sur la somme rondelette que ses cadeaux allaient lui coûter... Avant de revenir se poser en douceur sur la fiole et ses reflets... tentateurs...


Elle n'est pas.. passée au moins ?

Temporiser encore un peu avant de céder. Ou s'assurer que la marchandise ne date pas de Levan de Normandie... On est jamais trop prudent.
_________________
--Mougeotte


Petit sourire qui se fixe sur les lèvres ridées alors qu'elle penche la tête pour acquiescer à la satisfaction comblée. Puis elle remballe le trophée, ficelant solidement la patte dans son tissu pour ne pas qu'elle soit abîmée.

I v'bouinàe in paçhét ? *

La donzelle passe en revue tout ce qu'elle demandé, s'assurant sans doute qu'elle n'a rien oublié. Elle s'attarde un moment sur l'onguent presque figé, puis, un court instant après, fixe la fiole laissée là intentionnellement. Question précise et loin d'être anodine à laquelle la vieille répond du tac au tac.

I tot fràe fét. I fràe au vélle lune. O veùt dire ... Jheùdi **

* Je vous fais un paquet ?

** Il est tout frais. Je l'ai fait au dernier quartier de lune. C'est à dire ... Jeudi.
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