Arpha avait toujours l'oreille collée à la porte, son coeur battait tellement fort qu'elle se demandait si elle allait entendre quelque chose.
Autour d'elle les discussions s'étaient faites raisonnables, chacun reprenait son souffle et se préparait. Les propositions ne manquaient pas et chacune d'entre elles prenait en compte la sécurité de chaque citoyen ainsi que de ses biens.
Arpha était fière d'appartenir à un village où dans l'adversité, tout le monde se réunissait pour se battre côte à côte et sans rancune.
Et au milieu de ses pensées, son coeur fit un saut, passa un battement, et s'emballa à nouveau. Arpha avait entendu...
"Swift !! Jonathan Swift!!" Si faible et si lointain qu'elle n'était pas sûre. Elle leva la main pour faire signe aux autres qu'elle entendait quelque chose.
Arpha pressa encore son oreille contre le bois et attendit. Gorge sèche et langue pâteuse, yeux humides et joues rosies, elle attendit. Elle était tendue comme un arc, maintenue entre curiosité et peur, équilibre bien instable. L'aiguillon de la peur la poussait en arrière, celui de la curiosité et de l' aventure la talonnait vers l'avant. Qui était derrière cette porte ? Jonan Swit, avait-elle cru comprendre.
Elle répéta ce nom tout haut en demandant si quelqu'un savait... si quelqu'un connaissait.
Arpha les regarda et retendit l'oreille, inquiète de rater le moindre murmure qui passerait à travers la porte.
Et elle imagina la scène d'en haut. Deux âmes tendues et épuisées, séparées par une porte, chacune se demandant ce qu'il va se passer, chacune dans un cauchemar de peur et de déraison.
Arpha n'en pouvait plus de ce silence pesant, de cette incertitude rongeante.
J'entrebâille la porte ! C'est ce qu'elle fit doucement en regardant Floche et Shrek tous deux prêts à bondir comme des lions. Elle fit un signe de tête à Fée, Coeur et Arma, elles attendaient elles aussi armées jusqu'aux dents.
Mais rien... Il n'y avait pas de petit bonhomme vert s'enfuyant par l'entrebâillement. Alors Arpha se fit courageuse et glissa sa main blessée et enturbannée dans l'ouverture. Elle prit une grande inspiration et essaya de contrôler les tremblements de son corps sans succès. Si c'était un Lutin, il lui ferait une farce, si c'était un cheval il lui lècherait la main, si c'était un ogre il la lui mangerait et si c'était un être humain, elle ne savait pas mais c'était sans doute sans danger. Le tout était de faire, à temps, la différence entre le cheval et l'ogre.