Zeji
-Brelan de 9!
-Full aux dames par les as... désolé mon ami!
Deux jours qu'ils jouaient, et il n'en avait pas gagné une. L'était loin d'être un spécialiste -on lui reconnaissait volontiers d'autres qualités que le bluff- mais il appréciait le coté stratégique du ramponneau. L'autre aussi, visiblement. Et il avait une longue expérience.
...
Tout avait commencé deux jours plus tôt, à Alençon.
-Oui, mon fils, nous en rediscuterons. je compte repasser ici ensuite.
Le garde de faction aux porte avait été particulièrement attentif au prêche du curé, car lui-même vivait dans la situation qu'avait évoqué le prélat. Il demandait maintenant plus de précisions sur les étapes à franchir pour se mettre en règle avec les lois de Dieu et des hommes. Mais le père Zeji n'avait point le temps de s'attarder. Sa soeur avait quitté la ville et lui demandait de la rejoindre dans une ville proche; à une journée de marche tout de même. Il avait parcouru monts et vaux pour rejoindre sa chère parente qu'il n'avait pas vu depuis si longtemps, et ils n'avaient guère eu le temps que d'échanger quelques paroles (dans de drôles de circonstances, en plus, suite à un quiproquo, mais là n'est pas le sujet, on ne va pas revenir dessus sinon on va y passer la nuit!) Qu'est-ce que je disais, déjà? Ah, oui, sa soeur! Disparue, donc, avec pour toute explication un mot lui enjoignant de la rejoindre à Mortagne. C'était là qu'elle devait défendre son duché.
C'était là son devoir de duchesse.
Las, tout le duché était en ébullition. Les lunes pourpres campaient aux abords de la ville. Les rumeurs les plus folles faisaient état de combats ayant opposés ces brigands aux troupes royales; l'on disait même la reyne elle-même blessée. A vrai dire, certains la disaient mortes, d'autres au contraire assuraient qu'elle avait été épargné, et les derniers prétendait qu'elle était dans son chateau à Paris! Dans ces cas là, il valait mieux croire le milieu, l'on était moins désappointé quand on apprenait l'entière vérité. L'armée alençonnaise, elle, contrôlait toutes les entrées et sorties de la ville. Avec son accent normand, il ne passait pas innapperçu, et plus d'une fois il avait été montré du doigt comme "l'étranger" avec un air qui en disait long. Heureusement qu'il avait pu nouer quelques relations; le capitaine Kelkun lui assurait sa protection. Et le sauf-conduit de la duchesse était un précieux sésame.
S'étant assuré de toutes les formalités, il avait préparé son voyage, non sans une certaine appréhension. Rejoindre Mortagne serait délicat, certes. Il faudrait éviter le camp des brigands, et ne pas tomber sur des confrères à eux. En ces temps troubles nuls doutes que certains malheureux voudraient profiter que l'armée est occupée sur les remparts pour tenter leur chance sur les chemins. L'on lui avait indiqué un chemin discret pour sortir de la ville. C'est par là qu'il atteignit les bois.
Une robe de bure et une crosse pour touts signes distinctifs de sa charge. ses vêtements sacerdotaux étaient restés au domaine de la duchesse. On pouvait dans le sous-bois le confondre avec n'importe quel serf ou soldat mal équipé. C'est ce qui se passa surement. A moins que ce ne fût intentionnel, allez savoir avec des gens sans foi ni loi. peut-être même que certains d'entre eux se vanteraient d'avoir occis un homme de Dieu. Qu'il prenne en pitié leur âme!
Toujours est-il que le sort voulu ce jour-là que les Lunes avaient plié leur camp, et pris la route. La même que lui, à travers le bois.
-Qui va là? s'enquit-il en entendant des mouvements dans les buissons proches. "Un sanglier? Ce serait ma veine!" pensa-t-il
Quand la douzaine de soudards lui fit face, il se demanda s'il n'aurait pas préféré rencontrer une bête sauvage. Il aurait eu plus de chance de s'en sortir.
Quand les hommes du village entendirent son cri, ils dépéchèrent quelques soldats, qui le trouvèrent gisant dans son sang. Son coeur battait encoe faiblement. Assez pour qu'il puisse demander qu'on envoie un message à sa tendre soeur tandis qu'on le transportait sur une civière. Non, il ne pourrait pas la marier en mars. Il serait en compagnie d'Aristote, la-haut.
Il n'avait pas sitôt été déposé sur la litière de l'hospice qu'il rendit l'âme. Sans un prêtre à ses cotés pour bénir son dernier voyage, un comble! Et c'est ainsi qu'il s'était retrouvé à jouer au ramponneau avec Gabriel. Ce dernier lui soutenait que c'était la deuxième fois, la première remontant à l'époque de l'effondrement de l'église de Bayeux, mais conformément à la volonté divine, il n'en avait point gardé souvenir. Il y avit foule en ce moment à se présenter au tribunal céleste, et l'archange lui avait proposé de patienter ainsi. Pris au jeu, il n'avait pas vu les deux jours passer.
-Bon, c'est pas tout ça, mais j'ai du travail, moi... lança l'invincible ramponneur. Toi aussi d'ailleurs!
-Oh, j'ai l'étenité devant moi maintenant...
-Ooopp oop hop! Qui t'as dis que ta mission sur terre était achevée? Il me semble que tu as encore de nombreuses promesses à honorer!
-Mais... je suis ici par la volonté de Dieu, non?
-Lui? Non! Les hommes se débrouillent suffisemment bien pour arriver ici plus tôt qu'Il ne le voudrait. D'autant que dans ton cas... on s'est fait prendre de court. Bref. Ravi d'avoir pu jouer avec toi.
L'archange leva la main, et se mit soudain à rétrécir. Tout comme les montagnes et les nuages autour de lui. Giovanni était propulsé en arrière à toute vitesse, parcourant en sens inverse des contrées inexplorées qui séparaient l'Olympe des alpes mancelles. Il vint percuter son propre coprs avec une violence qui... ben rien du tout en fait. Dans une respiration.
Une respiration qui fit manquer de défaillir la brave grenouille de bénitier qui s'affairait à laver le corps en vue de l'ensevelissement.
-Giosep-Maria-Jeshua! Par les saintes burnes du pape, y respire!
-Que... une impession brumeuse s'estompait dans sa tête, comme un rêve qu'on oublie au réveil.
...ben heureusement que je respire, ma fille!
-Mais, mais... vous étiez mort, mon père!
-Mort? Je me trouve soudain bien prolixe pour un mort! Allons...
il tenta de se relever aouch! c'était encore trop tôt. Si les dernière 48h n'étaient qu'un trou noir dans son esprit, il gardait en revanche intact le souvenir de la bastonnade qu'il avait reçue.
Ainsi que les visages de ses aggresseurs.
_________________
-Full aux dames par les as... désolé mon ami!
Deux jours qu'ils jouaient, et il n'en avait pas gagné une. L'était loin d'être un spécialiste -on lui reconnaissait volontiers d'autres qualités que le bluff- mais il appréciait le coté stratégique du ramponneau. L'autre aussi, visiblement. Et il avait une longue expérience.
...
Tout avait commencé deux jours plus tôt, à Alençon.
-Oui, mon fils, nous en rediscuterons. je compte repasser ici ensuite.
Le garde de faction aux porte avait été particulièrement attentif au prêche du curé, car lui-même vivait dans la situation qu'avait évoqué le prélat. Il demandait maintenant plus de précisions sur les étapes à franchir pour se mettre en règle avec les lois de Dieu et des hommes. Mais le père Zeji n'avait point le temps de s'attarder. Sa soeur avait quitté la ville et lui demandait de la rejoindre dans une ville proche; à une journée de marche tout de même. Il avait parcouru monts et vaux pour rejoindre sa chère parente qu'il n'avait pas vu depuis si longtemps, et ils n'avaient guère eu le temps que d'échanger quelques paroles (dans de drôles de circonstances, en plus, suite à un quiproquo, mais là n'est pas le sujet, on ne va pas revenir dessus sinon on va y passer la nuit!) Qu'est-ce que je disais, déjà? Ah, oui, sa soeur! Disparue, donc, avec pour toute explication un mot lui enjoignant de la rejoindre à Mortagne. C'était là qu'elle devait défendre son duché.
C'était là son devoir de duchesse.
Las, tout le duché était en ébullition. Les lunes pourpres campaient aux abords de la ville. Les rumeurs les plus folles faisaient état de combats ayant opposés ces brigands aux troupes royales; l'on disait même la reyne elle-même blessée. A vrai dire, certains la disaient mortes, d'autres au contraire assuraient qu'elle avait été épargné, et les derniers prétendait qu'elle était dans son chateau à Paris! Dans ces cas là, il valait mieux croire le milieu, l'on était moins désappointé quand on apprenait l'entière vérité. L'armée alençonnaise, elle, contrôlait toutes les entrées et sorties de la ville. Avec son accent normand, il ne passait pas innapperçu, et plus d'une fois il avait été montré du doigt comme "l'étranger" avec un air qui en disait long. Heureusement qu'il avait pu nouer quelques relations; le capitaine Kelkun lui assurait sa protection. Et le sauf-conduit de la duchesse était un précieux sésame.
S'étant assuré de toutes les formalités, il avait préparé son voyage, non sans une certaine appréhension. Rejoindre Mortagne serait délicat, certes. Il faudrait éviter le camp des brigands, et ne pas tomber sur des confrères à eux. En ces temps troubles nuls doutes que certains malheureux voudraient profiter que l'armée est occupée sur les remparts pour tenter leur chance sur les chemins. L'on lui avait indiqué un chemin discret pour sortir de la ville. C'est par là qu'il atteignit les bois.
Une robe de bure et une crosse pour touts signes distinctifs de sa charge. ses vêtements sacerdotaux étaient restés au domaine de la duchesse. On pouvait dans le sous-bois le confondre avec n'importe quel serf ou soldat mal équipé. C'est ce qui se passa surement. A moins que ce ne fût intentionnel, allez savoir avec des gens sans foi ni loi. peut-être même que certains d'entre eux se vanteraient d'avoir occis un homme de Dieu. Qu'il prenne en pitié leur âme!
Toujours est-il que le sort voulu ce jour-là que les Lunes avaient plié leur camp, et pris la route. La même que lui, à travers le bois.
-Qui va là? s'enquit-il en entendant des mouvements dans les buissons proches. "Un sanglier? Ce serait ma veine!" pensa-t-il
Quand la douzaine de soudards lui fit face, il se demanda s'il n'aurait pas préféré rencontrer une bête sauvage. Il aurait eu plus de chance de s'en sortir.
Quand les hommes du village entendirent son cri, ils dépéchèrent quelques soldats, qui le trouvèrent gisant dans son sang. Son coeur battait encoe faiblement. Assez pour qu'il puisse demander qu'on envoie un message à sa tendre soeur tandis qu'on le transportait sur une civière. Non, il ne pourrait pas la marier en mars. Il serait en compagnie d'Aristote, la-haut.
Il n'avait pas sitôt été déposé sur la litière de l'hospice qu'il rendit l'âme. Sans un prêtre à ses cotés pour bénir son dernier voyage, un comble! Et c'est ainsi qu'il s'était retrouvé à jouer au ramponneau avec Gabriel. Ce dernier lui soutenait que c'était la deuxième fois, la première remontant à l'époque de l'effondrement de l'église de Bayeux, mais conformément à la volonté divine, il n'en avait point gardé souvenir. Il y avit foule en ce moment à se présenter au tribunal céleste, et l'archange lui avait proposé de patienter ainsi. Pris au jeu, il n'avait pas vu les deux jours passer.
-Bon, c'est pas tout ça, mais j'ai du travail, moi... lança l'invincible ramponneur. Toi aussi d'ailleurs!
-Oh, j'ai l'étenité devant moi maintenant...
-Ooopp oop hop! Qui t'as dis que ta mission sur terre était achevée? Il me semble que tu as encore de nombreuses promesses à honorer!
-Mais... je suis ici par la volonté de Dieu, non?
-Lui? Non! Les hommes se débrouillent suffisemment bien pour arriver ici plus tôt qu'Il ne le voudrait. D'autant que dans ton cas... on s'est fait prendre de court. Bref. Ravi d'avoir pu jouer avec toi.
L'archange leva la main, et se mit soudain à rétrécir. Tout comme les montagnes et les nuages autour de lui. Giovanni était propulsé en arrière à toute vitesse, parcourant en sens inverse des contrées inexplorées qui séparaient l'Olympe des alpes mancelles. Il vint percuter son propre coprs avec une violence qui... ben rien du tout en fait. Dans une respiration.
Une respiration qui fit manquer de défaillir la brave grenouille de bénitier qui s'affairait à laver le corps en vue de l'ensevelissement.
-Giosep-Maria-Jeshua! Par les saintes burnes du pape, y respire!
-Que... une impession brumeuse s'estompait dans sa tête, comme un rêve qu'on oublie au réveil.
...ben heureusement que je respire, ma fille!
-Mais, mais... vous étiez mort, mon père!
-Mort? Je me trouve soudain bien prolixe pour un mort! Allons...
il tenta de se relever aouch! c'était encore trop tôt. Si les dernière 48h n'étaient qu'un trou noir dans son esprit, il gardait en revanche intact le souvenir de la bastonnade qu'il avait reçue.
Ainsi que les visages de ses aggresseurs.
_________________