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[RP] Kiss kiss bang bang

Aimbaud
La doulce faute...
La faute charmante... Qu'il est bon pour le blanc-bec de se laisser entraîner aux jeux galants que lui enseigne la Bretonne, du bout des lèvres. Oh le plaisir que cela cause, les sentiments que cela éveille. Ce n'est pourtant que de la peau, rosée et tendre certes, mais ça s'insinue entre chaque sillon sur la surface de sa nuque pour y répandre un flot de picotements qui l'émeuvent.

Il ne devrait pas, mais il n'en a rien à battre. Ça n'est pas sa faute... C'est elle, l'instigatrice de ce complot des sens. C'est elle qui l'assoiffe, qui l'extermine, qui lui ôte tous ses mots et sa raison jusqu'à le rendre aussi incapable qu'un bibelot... Il ne peut rien faire, il est victimisé. N'est-ce pas ? Hé oui, captif... et tellement ravi...

Tant qu'il ne fait pas le premier pas, il n'est pas en tort. N'est-ce pas ? Tant que c'est elle qui l'embrasse, qui l'étreint, qui l'échauffe... Il ne fait rien de mal. C'est évident ! On n'est pas coupable de profiter des faveurs qu'on vous octroie sans vous demander votre avis... Hum ? Où est le problème...?
Aimbaud ?
De mauvaise foi ?
Nan nan. Vous avez fumé la tapisserie... C'est juste du bon sens. Regardez-le à obéir sagement quand elle le prie de partager la chaleur de ses mains, d'une pression douce. À garder sa tête contre la sienne quand elle aime à en prolonger le contact... À partager charitablement son souffle... Comment pourrait-il être coupable ? Un chérubin pareil, on lui donnerait le Très-Haut sans confession et une paire d'ailes en pochette surprise...

Ça n'est pas sa faute.


- Madame ?

Un cri. Tout explose en confettis.
Oh Blanche, ma mie, ma jolie, vous venez de me défoncer les tympans. Gaaah. Il remballe ses pattes dans les poches de ses braies, plus rapide qu'un lièvre au son du cor. Le corps justement qui s'oriente vers la porte de sortie, à grand renfort de pas chassés.


Héhéhéhé hem, dame ! J'allais justement prendre congé car j'ai..

Mon cheval qui doit se faire changer les fers.
Un don aux enfants lépreux de l'Hostel-Dieu nivernais à faire.
L'enterrement de ma grand tante par alliance, paix à son âme...


J'ai fort à faire.

Brève révérence.
Il disparaît en grommelant un "woupla", rattrapant de justesse le vase précieux qu'il allait faire voler en éclats. Puis il dévale les marches de la demeure en se prenant les pieds dans le tapis, manque de renverser dans son élan une armure de collection exposée dans le hall, s'excuse après être rentré dans le plateau de bouchées-à-la-Béatritz que transportait un gâte-sauce, se cogne dans la porte-basse des écuries, et enfin râlant et pestant, il fouille ses poches pour en tirer un vieux bout de fusain et un morceau de parchemin afin d'écrire, en appui sur la fesse de son cheval :




      S'il vous sied, je viendrai demain. Mon amie.
      A.J.


Remet cela à la damoiselle de Walsh-Serrant.

Fait-il en ouvrant la main sale d'un palefrenier. Et puis il talonne sa bête, tout tourneboulé. Le vent du galop remet un coup de froid sur ses idées...

°°°

La nuitée venue, dans la tour sud de Corbigny, la journée s'étant égayée d'une passe-d'armes avec son maître à l'épée, et d'heures studieuses sur des parchemins de pastorale...
... sans souci il se couche : et là, levant les yeux
Et la bouche et le coeur vers la voûte des cieux,
Il fait son oraison, priant la bonté haute
De vouloir pardonner doucement à sa faute...

— Ronsard —

_________________
Blanche_
    "Ton orgueil, tes caprices, tes baisers, des délices, tes désirs, des supplices, je vois vraiment pas où ça nous mène !"


Les bras lui en tombèrent.
Et, yeux écarquillés, elle le regarda fuir comme si elle dégageait une odeur nauséabonde, comme s'il avait décelé dans son être une once d'horreur, comme si d'ange, elle était devenue pestiférée. Le regard, en retour, tout désolé de Camille qui ne savait comment considérer autrement la situation qu'avec pitié, acheva la nouvelle baronne.


- Ce n'est pas ce que vous croyez, lança t'elle alors, à nouveau, mais par une voix grave et insolente.
C'était la réplique d'une mignonne déçue par l’outrecuidance d'une domestique.
Et puis, n'avez vous rien d'autre à faire que de venir me déranger en plein travail ?

Un instant, le silence se fit. C'était drôle, de sentir en chacune l'acceptation de leurs fautes ; l'une pourrait dire "Oui, je sais, cela est mal, mais je m'en repends bien, et puis, tu vois, il part !" tandis que l'autre supplierait qu'on la pardonne d'avoir troublé un moment saint. Mais ce n'était qu'un seul instant...

- Je te hais, tu as tout gâché, tu gâches toujours tout !
Dit elle, en se relevant, pimbêche, et en frottant cette joue qu'il avait caressée. De sa main, si elle avait pu, elle aurait giflé celle de l'infante aux tâches de son, pour le plaisir, pour l'angoisse aussi, pour l'idée qu'il était dans ses bras mais ne l'était plus.
- Je te HAIS ! reprit-elle, mais avant que de frapper, la domestique avait tourné les talons, et évité la main vengeresse. Reviens ! Camille, reviens, ou je te ferai fouetter !

Elle dévala, à sa suite, les escaliers. Manqua de tomber là où, peu avant, il s'était empêtré dans les plis du tapis, et avait transformé le liseré bleu plat, en un fatras de poils tendus, drus, vers le ciel.
Elle acheva de tirer la lourde décoration plus vers la sortie, la pointe de sa chausse se prenant dans une boucle traître.

- Reviiiens !

Aurait-elle parlé à Aimbaud, qu'elle n'aurait pas été plus suppliante.
Mais Aimbaud était parti, et lorsqu'elle arriva, pour vérifier, jusqu'aux écuries de Decize, il ne restait en témoin de sa présence, qu'un box plus chaud que les autres, au foin foulé.
Au milieu de la paille, un fusain noir était fendu en deux ; mais les bouts, indistincts, se perdaient parmi les traits clairs d'une paille nouvelle.


- Bordel de m.erde ! tonna t'elle en frappant un coup à la porte de bois.
- On a laissé ça pour vous, répondit un visage sale de vilain.
_________________
Aimbaud
    Fragment IV


Remparts-sud de Corbigny. Un brin de soleil pointe son nez au sortir de l'hiver. Alors lâchant leurs casques et leurs lances, leurs enluminures de ribaudes et leur casse-dalle de quatre-heures, les membres de la garde de Corbigny se regroupent autour d'une petite partie de ramponneau.

- Eeeeet cinq écus de plus pour messire de Josselinière. Alors Dédé, tu relèves ?
- J'me tâte, j'me tâte...


Aimbaud arbore le sourire agaçant du petit malin qui bluffe comme il respire.

Couche-toi Dédé, j'ai foule de Reynes.
- Messire c'point juste, j'ai pô la fortune moué...!
Couaaard.
- Dédé se couche.
Gniah ah ah ah ah !


Et le Josselinière d'empocher le solde, quinze pièces sonnantes.

Messieurs, je suis un sacré chanceux.
- Tout l'monde voué cela.
Et c'est pas tout, bande de punaises. Si vous saviez... Il y a une damoiselle, mes lascars, hummmm ! J'en jure, son coeur m'appartient. Je suis un sacré foutr'Ari de chanceux, chers amis. Croyez-le croyez-le pas. J'ai une donzelle qui m'a à la bonne, jusqu'à la mort !
- Boom da da boom da da boom.
Qu'est-ce que tu dis, Dédé ?
- Oh rien messire. Vous êtes foutrement chanceux.

_________________
Blanche_
La veille.
Decize s'éteignait sous les nuages violets, et le bruit des oiseaux qui partaient dormir. Même de loin, dans la plaine plate qui entourait le petit château, les silhouettes courbées des paysans se relevaient, laissaient choir leurs outils sur la terre meuble, et retournaient à leurs tanières de vilains. C'était cela, les derniers bruits de cette terre bourguignonne, les amas de ferraille et de bois détachés pour les cultures, et que l'on abandonnait dans les champs, quand les animaux des bois et des fermes, eux aussi, s'en allaient cueillir la chaleur de leur couple, et de leur portée.
Dans le castel voisin, à la différence de la lumière qui disparaissait des terrains neutres, on allumait toutes les bougies, et tous les âtres, on s'affairait à cuire le dîner, l'on laissait l'odeur du cochon embroché poindre jusque dans les chambres, on tendait sous les draps, des boites en fer brûlantes dans des poches de soie.
La veille, Blanche avait fini le jour au petit salon. A s'user les yeux sur des livres écrits petits, et parlant de choses inutiles ; elle ne le faisait pas pour s'instruire, car à la vérité, la plupart des ouvrages savants ne sont pas écrits pour les femmes, ni par des femmes, ils parlent de sujets et d'autres thèmes, qui dans leur façon d'être exposés et écrits, ne plaisent immédiatement qu'à la gente masculine. Dès lors, et surtout pour une femme superficielle, il est d'autant plus difficile de s’intéresser à un ouvrage, dont même l'auteur assurément, se serait venté de n'avoir aucune lectrice.

Camille entra. Sans déconcentrer la liseuse, elle alluma la bougie sur la table près d'elle, et ne laissa à son déplaisir, que le bruit de la flamme qui démarre. En quelques pas, et quelques crissements sur le parquet, elle était déjà repartie.

- Foutre Dieu ! murmura Blanche, qui avait pris depuis peu, la sale habitude que de jurer en français, pour de telles circonstances. Foutre Dieu, oui, et cela semblait évident pour en marquer l'importance, qu'il fallait blasphémer de concert, que cela est navrant!
Elle posa "De l'usage des serfs" sur la petite table, et pris dans sa main le bougeoir d'étain, pour aller le poser près de la fenêtre. Le noir était si imposé, qu'elle ne voyait plus l'arc-en-ciel de couleur sur la cour et les dépendances ; parfois, une porte ouverte, et la lueur qu'elle dégageait, redonnait à la tête d'un âne ou une flaque au sol, sa palette perdue. Mais la plupart du temps, il n'était à leur place, qu'une tâche sombre ou un trait noir, qu'on aurait dit marqué au fusain par la main de Dieu.

L'obscurité noya son chagrin ; jusqu'à ce que, relevant très légèrement la tête, elle crut voir le visage d'Aimbaud dans une mare céruléenne.
Brusquement.
Elle lâcha le bougeoir, qui chut jusqu'au sol, où par un heureux hasard -car elle n'avait pas la tête à empêcher la mèche de brûler le parterre de fleurs- il gagna la froideur du mur et s'éteint. Dans l'espace un peu plus noir, face à cette fenêtre où les rayons de la lune ne reflétaient rien, sinon les ombrages des arbres, elle aurait juré que le visage riait.
Il se moquait, Ah ! Le vil !


- Il se moque. Ah, le vil, quelle scélératesse que de le supporter ! Il me faut partir, où je me perdrai...
Camille !

Le vil, le vil, se disait elle en restant loin, très loin de la fenêtre. Il ne fallut que quelques instants, pour que la domestique qui était restée à l'étage, ne rejoigne l'éplorée. Camille !
- Oui, Madame.
Dans un geste las, du bras blancs qui s'éleva derrière elle -car elle se tenait obstinément recluse, à l'abris, tournant dos à l'ouverture- elle manda à ce qu'elle ferme les rideaux. Sans rien n'y comprendre, sinon que l'affaire était grave, la rousse s'activa, et les lourds pans de velours doublés se fermèrent l'un vers l'autre, en crissant sur la tringle en fer.
- C'est fait, Madame.
Mais Blanche ne se tourna pas.

- Il se moque, rajouta-t'elle, à peine assez fort pour que la suivante puisse l'entendre. Et surtout, avec ce petit accent susurré, que l'on remarquait de moins en moins, mais qui écorchait toujours les syllabes que l'on prononçait d'une autre façon dans le royaume d'Avalon. Les "ch-", les "qu-", tout cela elle les disait, mais ils avaient quelque chose en plus qui les rendait délicats à l'oreille. Comme une discussion ordinaire que l'on aurait eu le bon goût de faire en latin.
Camille, donc, ôta son tablier noirci pas les cendres, lorsqu'elle avait nettoyé tous les chandeliers du grand salon, et tourna autour de la baronne pour épousseter sa robe, comme elle l'avait fait avec les meubles, les dorures et les tableaux qui paraient Decize.

Bientôt, elle remontait les rubans, refardait les joues. C'était bien vain, que de faire cela une heure à peine avant le coucher.
Mais il n'y avait pas grand chose d'autre à faire, quand la petitesse de sa condition lui interdisait d'offrir à la bretonne autre chose qu'une maigre consolation.


- Le spectacle doit continuer, clôtura t'elle simplement, en redonnant à l'enfante le petit livre enluminé. Il pendait à son coté un galon d'or, aussi pur que les perles à ses oreilles, qu'elle avait laissé pour garder la page.
- Je dois trouver la volonté de poursuivre...
L'horloge sonna l'heure du dîner. Percevant son trouble, la rousse répéta qu'il fallait y aller. Le spectacle, le dîner, la représentation, la comédie de sa vie continuait, et en actrice principale, comme elle l'avait toujours voulu, elle devrait y aller.
Elle se leva. Dans sa tête, incapable de fixer les rideaux sombres, elle voyait un visage tyrannique lui rire au nez. Basculant le cou, elle prit une longue inspiration, ainsi tourné, la nuque pliée pour mieux balancer la tête en arrière. Les larmes refoulaient dans son nez, et c'était mieux.

Finalement, lorsque l'on fit amener les premiers plats, l'hermine goûta de tout, s'amusa des nouvelles sauces, choisit même une perdrix, elle qui d'ordinaire détestait la chair blanche des oiseaux. Elle planta couteau dans le foie luisant d'un boeuf égorgé le matin, rit quand sur sa tranche de pain de seigle, glissa une fine coulée de jus de fruit, qui éclaboussa son voisin de table.
Les desserts, aussi, réveillèrent un appétit insoupçonné. Le spectacle, oui ce spectacle-là continuait, il était gai et de toutes les couleurs, sonore aussi, que c'était beau une bretonne qui riait dans une salle de réception !
La tête haute, redressée avec une fierté soudaine, elle avait décidé d'inclure dans sa vie une frivolité excellente et parfaite, peuplée de dindes farcies et de faisans en sauce, de poudre et de bonnes résolutions.


Outside the dawn is breaking
On the stage that holds
Our final destiny..!


Le spectacle, Blanche.
Le spectacle doit continuer ! Doit, DOIT !
Continuer. Continuer. On, go on with the, on with the show !
Les perles tintèrent lorsqu'elle tourna le regard vers Clémence, qui présidait le repas. On, go on... Elle avait les yeux rouges, cette bretonne, et une veine saillante au cou, qui montrait sa dure décision. Ou peut être était-ce les sauces et le pain.
The show must go on !

Sa main, sous la nappe, tournait et retournait les pages d'un ouvrage de servage, et de paysans. Dépassant du bord, un petit bout de papier inscrivant à la blancheur immaculée de ses mains, des traits grossiers de fusains.
On, with the show....


[The show must go on, Queen]
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Aimbaud
Remparts sud. Quand on laisse tomber les cartes...

Tout commence par un pied...

- Un pied ?!
Oui non, ça peut paraître banal dit comme ça... Mais c'est vraiment un très... très fin, très mignon petit pied... Je l'ai vu, il était tout blanc comme de la mie de pain.
- Appétissant !

Un pied de Reyne, manants ! Ca ne fait même pas grincer le parquet, ça sautille, ça... se réfugie dans la soie...!

- Continuez m'sire, continuez !
La jambe.
- OOoh hou hou hou.

Bon, je ne l'ai qu'entre-vue hein. Une cheville, messieurs, une cheville... Menue comme un poignet d'enfant, à se demander comment ça ne se brise pas tout seul. Et puis en grimpant, grimpant... Une courbe très mignonnette, blanche toujours, pure...! J'en viens au genou.

- Le genou ! Le genou !

Un petit mont tendre. Pas cagneux comme vos paluches de bourrins ! Ca avait l'air plus lisse que le satin, tout juste fait pour épouser la paume de la main. Et PAF ! ça a disparu sous la couette.
- Enflure d'couette ! Et après...?

Les cuisses...
- Dites ! Oh vindieu dites !

Les cuisses, ô les cuisses... A travers la chainse, hein. Mais cuisses tout de même, morbleu. Deux jolies cuisselettes vallonnées, dessinées comme un rêve, ni point trop minces ni trop épaisses, juste tant bien sculptées... Et agiles ! Frémissantes. Agitées...! Puis tendres, qui plissent la petite-laine de manière enjôleuse...
- AAaaïïh ! V'dites bien les choses, m'sire !...

Mais laissez-moi vous parler de la croupe.
- On z'écoute.
Mignonne.
- C'est tout ?

Oooh non. Très. Très très. Très... TRèèèès. Très mignonne. Elle ne portait pas mille épaisseurs de jupons pour la nuit... J'en ai vu le dessin comme s'il n'eut pas été de tissu ! Ronde. Taquine...! Une courbe à émouvoir le statue de pierre. Et sans doute ferme et tiède mais... Mais ça j'ai pu en juger.

- Et le haut, le haut ?
La tête ?
- Un peu plus bas.
Oula...
- Tant que ça ?

Oula la la la. Si vous aviez vu cela. C'était si... si... Généreux. Debout, allongée, penchée, sautillante, cambrée, boudeuse : ça s'agitait tant et tant sous mon nez ! Pas de corsage, mes braves ! Une rondeur, oh une rondeur...! Cela piquait le tissu en deux endroits très charmants. Et je ne sais exactement où elle était allée loger sa parfumerie, mais il me semble que c'était bien du col que cela jaillissait, juste entre les deux ô ho ho petites pommes qu'elle a même pressé contre mon poitrail par la suite...!

- Beh purée...
- Bou de dju...
- Ca fait réfléchir...

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Blanche_
Il arrive un moment dans la vie d'une femme, où il faut qu'elle songe aux hommes et à leur impact en étant pour le moins objective. Que Blanche soit incapable de l'être au sujet d'Aimbaud, cela était autre chose ; elle en était arrivée, à ce précis moment, et il fallait qu'elle trouvât les mots pour expliquer son importance, sans quoi il s'en suivrait tout un tas de consternation sur sa faiblesse romantique, relativement désagréables.

Savoir.
Ce qu'Aimbaud fait, dans sa vie. Elle songe.
Il me fait...


- Tournez la tête.
Elle s’exécute, docile, jusqu'à la position souhaitée par la couturière. L'espace d'un instant, elle croise une silhouette vert émeraude dans le psyché, et la trouve délicieuse. Cambrée, autant par sa physiologie naturelle, que par le corset à la dernière mode. Et, là présentée, sur ces marches comme un piédestal, la mannequin n'est plus si misérable.
Ce qu'Aimbaud fait, pour elle, avec elle, contre elle ?
Il lui fait... Beaucoup de choses. Beaucoup de répercussions, de conséquences désastreuses, et inévitables c'est certain. Tant, tant, tant de choses qu'elle en perd le fil. Elle tourne, tourne, la tête, comme dans un manège... Aimbaud, lui, elle, eux, Yolanda, Béatrice, Clémence, Della, encore Della, puis Aimbaud, et Mumia, et Aimbaud, et Aimbaud, et lui encore... Un manège...

- A moi, c'est toi ! répond la baronne en piquant dans le coussin à sa disposition, une épingle qui la gênait. L'ouvrière se dépêche, tire sur un pan, ramène un lambeau serré contre la taille. De cette toile vert tendre, une taille de guêpe arrive à nouveau ; et Blanche en est ravie.

- Je suis toujours à la fête...
- Voulez vous ?

Le tenir dans vos bras, murmure la jeune dame, chignon tiré, en tendant un galon d'or aux petites mains blanches.
Reprenons, se répète Blanche. Il faut analyser la situation, en étant objective, rien n'est plus simple, l'objectivité ! Reprenons... Elle songe au visage enfant. Reprenons-nous, c'est indécent ! Il me faut partir, voyager... Je ferais le tour, du monde !


- Tournez-vous plus qu'ça !
Blanche grogne, tourne un peu ; disposée ainsi, elle voit le dos de la robe se refléter dans un miroir derrière. Elle se trouve belle. Les hanches élargies, oui, et c'est moins pur qu'une croupe d'enfant, mais c'est cela qu'il fallait, assurément, pour donner plus d'allure à une petite femme.
Voyager...
Partir !
La terre, est-elle assez

- Ronde ?
- Plutôt serrée, corrige la bretonne. Dans un vocabulaire bien plus maîtrisé qu'à son arrivée. Et, loin de ses anciennes hésitations et bégaiement, elle donne des ordres ne souffrant aucun refus.
- Si je serre trop, cela peut vous...

Étourdir autant que toi...
Elle ferme les yeux , le manque d'air, dans sa taille broyée, ramène une chaleur étouffante jusqu'à ses joues. Alors, péniblement, elle tend une main vers la couturière et s’agrippe à son épaule. Le temps que le malaise passe...

Il lui fait tourner, la tête.
Pom-po-popom. Ah, c'qu'ils sont bien tous les deux !
Pom, pom-po-pom, popom... Quand ils sont ensembles eux deux...!
Il lui fait tourner, la tête...

Elle sort ; paquet sous le bras. Une robe, odieusement chère, et qui lui a coûté plus que de l'argent : son orgueil. A, c'qu'ils sont bien tous les deux...


Elle s'en va, quérir l'avis positif de Clémence.
Et le courroux d'un petit garçon.


[E. Piaf]
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Aimbaud
[Corbigny place]

Dans la soirée.
Soleil qui commence à s'orangifier en penchant vers la cime des arbres. Lumière rasante sur les vignes et les terres en jachère, creusant les ombres, baignant les reliefs.
C'est l'époque des semailles à Corbigny, rude période pour les serfs fourbus qui regagnent leur foyer en traînant les sabots pour se réchauffer le ventre avec une soupe claire et croupie.

Rude période aussi pour le fils de la Seigneurie, qui se doit d'orchestrer toute cette maisnie, bailler à la bonne orchestration des champs et à la gérance de la fortune du domaine, sans avoir d'expérience aucune à cette tâche.

Un père absent, absorbé dans des chasses, des méditations, plongé de-mie dans un état qui frise la sénilité. Une soeur dépensière, qui claque les écus comme elle mord dans les choux-à-la-crème. Les clefs de la salle des coffres auxquelles il n'a pas accès... Autant de soucis qui amènent toute la valetaille à se serrer la ceinture depuis quelques temps... Et s'il n'y avait pas les primes du duché pour son engagement dans l'armée, Aimbaud de Josselinière se serait vu lui-même forcé de faire viande maigre !

Il y songe en piquant un morceau de gibier à son couteau avant de l'enfourner, mu de l'appétit solide que confère l'adolescence. Dans la grand salle du Château, personne d'autre que lui et une douzaine de plats n'occupe la table des banquets. Et tandis qu'il fait pitance, un ou deux chiens de chasse parmi ses préférés, jappent doucement autour de lui pour recevoir les os, des gardes salivent aux quatre coins de la pièce, et un Eustache — le secrétaire personnel de Josselinière Père — plus jaune que d'ordinaire, roide comme un piquet à la droite du gamin, l'entretien des informations nouvelles concernant le duché.


- Le duc a reçu une nouvelle menace de mort. Il serait sage, messire, que vous cessiez de boire à son verre, quand il l'échange avec le votre.
- Pfeuh ! Crois-tu vraiment que ces bec-à-foin de contestataires puissent parvenir à l'empoisonner au nez et à la barbe de la garde...?
- Prudence, prudence. Sinon votre écuyer a été vu en compagnie de brigands angevins.
- Fiachtre ! Je n'apprécie guère. S'il ne fait pas montre d'un peu plus de droiture, je lui signifierai son congé.
- Angélyque de la Mirandole n'a pas trouvé fameux que vous profériez en public qu'elle disait souventefois des âneries plus grosses que son tour de poitrine.
- Ca m'a échappé..
- Un homme d'armes de votre garde personnelle est mort d'un panaris ce matin.
- Eustache ! Je mange là !
- Hum bien, je passe sur les détails de l'entretien des latrines du château... Ah oui, et le commis d'un bourgeois-tisserand attend à la porte, pour le règlement d'une commande.
- Ca ne me dit rien... Faites venir.


Il ponctua ces mots d'une gorgée de vin coupé, puis renversa son assiette sur les dalles, provoquant sous la table, des aboiements ravis et des grognements satisfaits. Le commis entra, propre sur soi dans une livrée de luxe. Et après les salutations d'usage, il lui remit en main, une note extrêmement salée, ce qui n'était pas agréable pour terminer un repas...!

- 365,99 écus ?
- Grâce aux 5% de remise, vous êtes un très bon client.
- Euh... 'doit y avoir erreur. Ça n'est pas mon style le "Jupon retro mimosa".
- Mais c'est une femme qui a passé la commande, messire.
- Blonde ?
- Parfaitement blonde, messire.


Un petit bruit aigu et étouffé raisonna par dessus l'épaule d'Aimbaud. Vraisemblablement, Eustache retenait un éclat de rire, suivit de près par les quatre gardes qui pouffèrent dans leurs gants, et les deux chiens qui lâchèrent leurs os pour se fendre la gueule. Ou peut-être qu'Aimbaud était juste un petit peu parano...

- RAAaahrg. Non mais...! À quoi elle joue là ?!

Si elle croit qu'il va céder à tous ses caprices et se saigner à blanc pour ses petites folies...! Même s'il en avait les moyens d'abord, le voudrait-t'il ?
Elle joue, elle joue...
Il devrait pourtant ne plus avoir de surprises, il la connaît par coeur ! Argh... Non, diable, il ne sera pas son jouet.
Elle joue, elle joue... Eh bien c'est gagné, il est en boule !
Ça lui apprendra. Il se défendra. Il ferait n'importe quoi pour elle ? N'importe quoi !
Elle va lui assurer un enfer... Au secours ! Eh non, non. Il est encore libre de ruer.
Elle joue... Non. Elle ne décidera pas de son sort.
Mais chiotte... Argh ! Au secours !
Tant pis ! Elle a gagné.


- Hum... je peux vous payer en sacs de blés...?

Moue méprisante du commis.


°°°

Et c'est ainsi qu'un couple d'heures plus tard, une main gantée et furieuse s'abat sur la porte de Decize, à en faire trembler tous les gonds. Un Josselinière fulminant sous sa capuche, se présente au domaine. Un détail saute aux yeux : il a payé la commande avec les boutons plaqués or de sa veste.

_________________
Blanche_
    Fragment V


Let's go back, back to the beginning, back to when the earth, the sun, the stars... All alinged !

She defies.
Quelques coups portés à la porte, et des pas feutrés se faufillent vite à la chambre de Blanche, pour la prévenir. Qu'il est là, qu'il arrive, qu'il attend, qu'il est prêt à hurler. Qu'il sait, pour les 300 écus, et quelques poussières.
She defies.


- Mais laissez-le couiner à la porte, je ne veux pas le voir !
Dit elle. Artéfact...
La vérité, c'est qu'elle a voulu tout le jour, que c'était elle qui chouinait comme une malheureuse en prétextant que les hormones la rendaient toute chose, c'était elle qui serrait son coussin contre elle en laissant croire, en voulant croire à un amour seulement dédié à son fils, et puis c'est elle qui s'est recroquevillée face à la croix, face au Christ, pour renvoyer vers un Martyre son affection désordonnée.
A n'importe qui, à Thibaut, à Clémence, à Della, à Cassian, même, s'il le fallait, à Dieu si vraiment Il l'oblige, et, s'il n'y a que cela pour la sauver, à Chlodwig ! Mais à lui, ça, à lui, lui offrir !


She denies.
- Lai-ssez-le, Ca-mi-lle !
- Mais Blanche, il va pleuvoir.
- Peuh ! Il n'est pas en sucre !


L'eau se met à tomber. Cela n'arrêtera pas jusqu'au lendemain soir. Mais le lendemain soir, Blanche sera partie. Avant, juste avant, ses rides de front s'encrent plus au fond, se meurent derrière les sourcils, et dressent vers ses cheveux un laid empilement soucieux.
Au bout de quelques minutes, ne supportant plus l'eau qui tonne à ses vitres, ni le bébé qui pleure et qui l'agace, elle claque la porte sur le couloir, et descend, avec une lenteur exécrable, vers la porte d'entrée. Qu'elle ouvre, furieuse, faussement furieuse, exaspérée surtout, parce qu'il va hurler, et que sa voix qui se fâche lui fait peur.


- N'espérez même pas que je vous demande pardon ! s’acquitte-t'elle, dette effacée, en laissant un visage sec dans l’entrebâillement de la porte.
He defies.
Dieu, Dieu, Dieu, Dieu, scande son esprit malin.
She denies.
Dieu. Ô Dieu... Ah oui. Dieu, Dieu, Di... Ooh... 'beau.

C'est une catastrophe...!


[H. Duff]
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Aimbaud
La nuit est tombée en même temps que les seaux de pluie, et le Josselinière, trempé jusqu'à la moelle, peine à s'accoutumer à la lumière des chandelles qui lui fouette le visage à l'ouverture de la porte.

Fumant de colère, il s'est déjà engagé à redescendre les marches pour quitter le domaine, voyant que ses insultes braillées aux portiers n'avaient d'autre effet que de lui érailler la voix. Et les coups qu'il distribuait sur le bois : inutiles. Mais en entendant le verrou se déclencher, une nouvelle escalade de détermination le saisit.
Ah !

Elle le provoque, elle le ruine, elle lui refuse une visite ! Elle le laisse poireauter une mie-heure sous la flotte ! Eh bien elle va en entendre parler. Non mais quelle rosse, quelle peste ! La vipère. Il la hait.
Il la veut châtier. Soit. Il la traite de tous les noms. Il la fait chialer. Bien fait pour sa petite tête de pimbêche bling-bling superficielle même pas francophile. La plaie ! Ensuite il claque la porte et il ne la revoit plus de sa vie. Ouais. Bon programme. Approuvé. Il aime.
Ça va chier.

La porte s'ouvre.
Il plisse les yeux à la lumière des bougies.
Le beau visage s'encadre dans l'ouverture, tellement charmant et hautain qu'il voudrait en briser la mimique, la jeter en éclats comme un miroir. Il s'en fait un monstre, il la noircit de la voir si fière, elle ! Elle perfide, abominable, traîtresse, fille de rien, cruelle, insupportable ! Ah, elle veut la guerre ! Mais à la guerre, ma dame, il est dans son domaine, il en est le nerf ah ah. Il va la faire abdiquer, l'abattre, et là elle fera moins la revêche. Belle ou pas. Quelle dise adieu à son sourire satisfait. Il est Colère ! Il est "PAS DE QUARTIER !"...

La porte s'entre-ouvre. Les chandeliers crient de plein feu.
Alors, le fracas de la pluie s'efface quand Aimbaud pousse brusquement le battant de la porte pour entrer sans l'avis de personne. Ce qu'il fait en charriant avec lui une grosse flaque d'eau se déversant de sa cape, ainsi qu'un vent gelé, chargé d'humidité, qui malmène toutes les flammes dans le même sens. Il se moque bien d'être brutal cette fois. Les Corbigny ont cela de leur emblème que tout sangliers qu'ils sont, quand on les pique, ils chargent.

Ôtant sa capuche dans un mouvement d'humeur, il apparaît ruisselant et furibard, et ses bras s'ouvrent, non pas accueillants comme ceux d'un ami, querelleurs plutôt, comme le guignol des pièces paillardes qui fait savoir à tous qu'on l'a pris pour le dindon de la farce.


Alors ! QUOI. Vous vous foutez bien de ma gueule ?

Il avance sur elle avec des mimiques froides, tandis que ses mains gantées décrivent des cercles agaçants alentours en répandant de la pluie partout.

J'y suis ! On se distrait comme on peut, loin de chez-soi, c'est ça ? Oh, tiens ! Et si on s'amusait aux dépends de ce bon Aimbaud de Josselinière, ce petit niais qui vous distrait TANT !

Maintenant sa tête n'est plus très loin de la sienne, et les gouttes qui se rejoignent sous son menton doivent chuter quelque part dans la traîne de la robe bretonne qui s'étend sur les dalles. Les yeux noirs, du terreau burgonde, sont plantés comme des couteaux dans leurs homologues des marées bretonnes. Un silence pas très net vient de s'installer. Et puis il taille dans le vif avec un ton très calme.

Que les choses soient claires. J'abhorre à parler argent, nous ferons simple : ce qui est payé, est payé. Hors ça, je ne suis pas votre galant. Je n'ai point de largesse à vous faire, et celle-ci est bien la dernière.

Avant qu'il ne fasse volte-fasse vers la sorte, un tic lui échappe. Une sorte de bruit méprisant typique des cours de récré saumuriennes : un "tsss" avec aspiration de salive. La poigne se referme sur le loquet de la porte. Il rugit :

Et quand je frappe : on ouvre.
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Blanche_
Déjà qu'elle a du mal à raisonner correctement en français...
Alors l'écouter parler, en plus, non pas parler, hurler ! Oui hurler, il faudrait qu'elle comprenne ? N'espérez pas plus d'elle qu'un hochement de tête compréhensif, quoiqu'absorbé par la blancheur de sa peau, et ce miroitement si délicat du tapis qui s’imprègne d'eau, ce hochement ralentisse, se fige, reste coi quelques minutes, contemplatif, penché sur le coté pour en savourer les traits. Ô ce nez, ce joli-nez, ce nez mignon, et ces joues, mordez-moi ces j...
Restons concentrée.


...outez bien de ma gueule ?
C'est étrange, qu'il n'ait pas l'air simplement ravi de me voir, songe-t'elle sans s'avouer outre mesure ses fautes. Des fautes, elle, des erreurs, elle ? Ne soyez pas ridicules. C'est Blanche dont on parle. Blan-che. Aucune hésitation, bavure, de défaut ou de manquement à ses devoirs ? Blanche ? Blanche est au dessus des erreurs et des jugements !
Et quand je frappe : on ouvre.

- Ah, je vous en prie, ne haussez pas la voix, et ne parlez pas de frapper !
C'est Blanche dont on parle.
Elle a peur de la main des hommes, peur qu'on la frappe et qu'on la touche, voudrais-tu briser, alors, voudrais-tu massacrer cet ère de possession proposée, ce cadeau qui t'es réservé, Aimbaud de Josselinière ?
Sais-tu, jeune pédant, que sa peau, cette peau que ouvertement tu caresses et tu bafoues, sais-tu qu'elle est velours avec toi, et cuir avec d'autres ? Sur ce trône et cette couronne qu'on t'offres, tu craches dessus ? Vraiment, prends-tu autant de plaisir à la voir souffrir ?
Si l'on croit ta hargne et ton verbe assassin, rien ne saurait te contenter plus qu'une mise à mort digne d'un matador de Séville. Tu défiles devant ton ennemi qui ne se défile pas. Tu tournes autour, tu jauges, tu humes, ton haleine en criant, dégage un nuage tiède sous la pluie. C'est écoeurant. Tu. Tu es écoeurant, Aimbaud de Josselinière.

La génisse qui courbe l'échine, et qui te soumet son cou, c'était une Princesse.


- Calmez vous, Aimbaud. Je n'ai pas voulu vous causer de tort.
Pretty Woman, I dont believe you , You're not the truth !
Vous faites une montagne de quelques peccadilles !
Pretty Woman, dont walk on by, Pretty Woman, dont make me cry...

Elle incline la tête, qui lui tourne. C'est l'odeur de la pluie. Dieu, lui dira Camille dans quelques heures, Dieu vit dans la pluie.
Et cette pluie lui monte dans les narines et charcute son odorat.

- En vrai j'avais juste envie de vous forcer à venir.
But wait, what do I see? Is she walking back to me?
Yeah, shes walking back to me !


[R. Orbison]
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Aimbaud
Il s'est arrêté dans l'encart détrempé du palier, légèrement retenu par les bourrasques pluvieuses qui enragent dehors, et par la voix de Blanche, plus douce et franche qui souffle dans l'entrée du château. Il est en quelque sorte, partagé entre deux tempêtes. Mais il sent bien que d'un côté, sa colère maintenant déchargée, retombe comme cette eau de printemps qui inonde la Bourgogne.

Il renifle de la buée. Au fond elle a sûrement raison, il est colérique pour un rien. Qu'est-ce que la perte de 300 écus ? Qu'est-ce qu'avoir été jeté aux portes de Decize sous une pluie battante ? Qu'est-ce que l'abandon d'une menue fierté, à se savoir mené par le bout du nez ? Grrhgnnh....mais rien, voyons ! Pécadille.

Il essaye d'avaler cette mauvaise assiettée de rancoeur, détachant les yeux du rideau de pluie à l'extérieur, et rompant ses idées noires d'un passement de la main du front aux bajoues qui lui remet le visage à sec, ou peu s'en faut.


Ne me forcez pas... à venir.

La grande porte de Decize se referme, lente et lourde, coupant l'effort du vent. L'énorme fermoir de métal retombe de lui-même, avec un bruit inquiétant qui a de l'écho dans les pierres de la bâtisse. Changement de programme en perspective... Le jeune Josselinière est resté au sec, finalement...

Là, il fait plus chaud. Il s'égoutte et il s'évapore.


Je peux venir seul.

On appelle ça un refus d'autorité. Ça marche aussi avec Papa-Pair et Sa-Grasce-Maman... "Tu seras soldat mon fils ! — NON !". "Fais ce que tu veux mon fils. — Je serai soldat !". Étonnant comme il appert qu'Aimbaud de Josselinière n'a jamais autant filé droit depuis qu'on le laisse libre de faire ses choix... Il est certains caractères qu'il est mauvais de mettre aux brides... Et il y tient à son libre-arbitre. Contre tout licou qu'on tente de lui passer, il a l'arme fatale : la fugue. Bat-les-pattes, tyrannie.
Pourquoi reste-t'il alors ?...

... parce qu'il en a très envie.

Il se retourne. Le cuir se retire. L'espace est franchit pour que les paumes gelées puissent se poser sur les bras blancs, le visage s'encadrer dans la pente du cou... La toucher ? Non. Évidement que si. Il ouvre la bouche sur sa peau... et l'y referme.

Là, il fait plus chaud. Il s'égoutte. Il s'évapore...

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Blanche_
L'eau.
L'eau est un tas de petites molécules entrechoquées les unes contre les autres, qui tanguent et se caressent, se frappent, d'agitent, cognent dans tous les sens à une vitesse définie. Et, parfois, si le fracas est assez énergique, et que leur trajectoire se rétrécit, parfois, il arrive que l'une de ces petites sphères aux électrons satellites soit éjectée hors du globe humide, et se trouve en périphérie, dans un nuage d'air, à envelopper deux êtres d'une vapeur tiède.
L'eau.
L'eau part du cou et des épaules d'Aimbaud, qui se drape dans une cape trempée. L'eau s'évapore, c'est dit, ce sont ces petites sphères rosées qui sautillent vers Blanche, et l'eau, même vaporeuse, fait le trajet du bourguignon à la bretonne, d'une nuque à une autre.
Il y a de l'eau sur ses mains, ses doigts, ses bras, ses épaules, son dos, il y a de l'eau même dans sa bouche, et toute cette eau, d'où qu'elle vienne, n'aspire qu'à rejoindre celle de Blanche, celle qui bat, qui vit, sous les étoffes et les ornements dorés.

Ce n'est rien.
Rien qu'une réaction chimique.
Chimie et physique d'une attirance.
Ce n'est rien.


- Ma parole, arrêtez un peu votre cirque..! Point de remboursement, tant pis, je mettrai des cailloux à mes boutonnières ! rouspète-t'il, alors qu'elle essaye de se dégager, qu'elle le repousse, maternellement, et qu'elle lui promet de restituer toutes ces petites pièces d'or.
Et puis il sert, il sert fort, il a des mains de lion, de sanglier. Elle n'est rien du tout qu'une petite hermine qui se débat, qui se contorsionne dans tout un tas de positions difficiles et délicates, pour ne pas abîmer sa toison blanche, mais se libérer de son étau.
Qu'importe !
Qu'il soit pécari, elle roselet, qu'il soit cuir et elle pelisse ! Qu'il soit bourguignon et elle bretonne, qu'importe, qu'importe, l'eau de toute façon, vit dans l'un autant que dans l'autre...

Saviez vous qu'un corps est composé à 75% d'eau ?


- J'vous déteste.

C'est dit avec le maximum de conviction qu'une effarouchée amoureuse peut se le permettre. Mais attention ! Blanche déteste Aimbaud. Loin, loin, très loin d'elle l'idée de l'aimer, voyons. Cher lecteur, ne soit pas dupe : Blanche déteste, hait, abhorre et exècre le Josselinière. Evidemment. Absolument. Elle le maudit.

Evidemment...

Vous saviez aussi, que deux individus s'embrassant échangent en moyenne 40 000 parasites, 250 types de bactéries, 9 mg d'eau, 0,7 g d'albumine, 0,45 mg de sel, 0,711 mg de graisses, 0,18 g de matières organiques et dépensent quatre calories par minute. Vous saviez qu'un baiser amoureux sollicite pas moins de 34 muscles faciaux ?
Alors très certainement, désormais, vous pouvez scientifiquement comprendre pourquoi Blanche déteste Aimbaud de Josselinière. Les parasites, c'est dégueulasse !

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Aimbaud
Ce qu'il est bon de savoir, c'est qu'Aimbaud a une fâcheuse tendance à briser les choses fragiles. En sa présence, les carafes de verre pètent. Les tissus de soie s'effilent. Les bibelots en or ciselé terminent immanquablement éclatés au sol. Les petits animaux de compagnie de Yolanda, pareil. En conséquence, il n'aborde jamais une chose fragile sans se munir de beaucoup de prudence, et emprunt d'une certaine dose d'appréhension...
Blanche de Walsh Serrant est une chose fragile.

Quand elle cherche à s'échapper, il retient. Il retient fort, il s'y retient même. Mais pour se souvenir aussitôt que les coupes de cristal, quand on les serre, ça explose.
Pas casser.
Il attrape autre chose.
La taille là, c'est moins fragile. C'est étroit et souple, il y assure une bonne prise. Mais elle rechigne toujours, elle l'ignore et le boude en cherchant une issue. Il est horripilé. Elle veut ou elle veut pas ? Si elle veut c'est bien, si elle veut pas il en fera pas une maladie ! Tout de même, il la retient... Faut-il presser plus fort, au risque de la broyer...?
Mauvaise idée. En toute logique donc, faute d'une autre paire de bras, il l'attrape par la bouche.

Un silence inquiétant fait son entrée dans la salle du château. À cet instant, les semelles cessent de couiner dans les flaques d'eaux déversées sur les dalles, les tissus ne se froissent plus et les respirations se calment. Le blanc-bec a désamorcé l'arbalète ultra-sensible qui lui sert de bonne amie. Enfin un peu de paix. Elle capitule, Dieu merci.

Était-ce un baiser ?
Du moins c'étaient deux lèvres qui se pressent contre des jumelles, un peu téméraires et sans grande expérience. À vrai dire, c'est tellement inattendu qu'ils se mouillent à peine. Même les yeux n'ont pas eu le temps de se fermer. Et si cela produit des battements de coeurs, c'est qu'ils sont vraiment tous deux bien émotifs... Mais en somme, on peut en conclure que c'était un baiser.

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Blanche_, incarné par Yolanda_isabel


Un baiser.
Nul doute à cela, l'apprivoisement de deux lèvres l'une contre l'autre, et les nez qui se frottent, qui s'écrasent, l'occasion pour un autre bout de peau que de trouver et se rejoindre, pavaner l'un contre l'autre. C'est ce qu'elle pense. C'est un baiser, sûr, c'est un baiser ! Elle le pense, elle le croit, elle s'en persuade. C'est un baiser, nom masculin, lèvres, lèvres, doubles présences ! Baiser qui meurt, dents qui mordent, lèvres, lèvres, tout participe sur cette peau, à cette couillonnade, cette duperie, ce grand mensonge de deux êtres qui se trouvent et se bernent. Lèvres, lèvres ! Fermées, ouvertes, sucrées et tendres, qui picorent qui bectent, comme deux macarons à moitié goûtés, lèvres ! Des siennes elle se sent mourir et elle larmoie. Ce n'est qu'une immense comédie qu'un baiser, rien d'autre qu'un couple de trompeurs et de fallacieux qui cherchent à gagner la partie en se dominant l'un l'autre. Mais c'est un baiser, et c'est une évidence. Elle croit. C'est un baiser ! Il lui ment. Elle croit. C'est un baiser ! Elle lui ment. Mais les lèvres se retrouvent quoiqu'elle pense et se raconte, elles s'achètent et se dévorent, rien n'est plus beau qu'un mensonge qui dit la vérité.
Ah non plus de cela arrête j'ai mal et c'est écœurant je n'en peux plus et bestial que ces lèvres humides et ces soupirs rauques toi contre moi non jamais lâche moi je n'en peux plus c'est tellement horrible je vais mourir faut-il souffrir cela longtemps mon Dieu j'ai mal cœur ne ne et je ne sens plus mes jambes ma tête hurle quand cela va-t'il finir et si je meurs non arrête détestable ne t'écarte pas ne ne si tu pars pire reste j'ai mal finalement ou non bordel mon Dieu mais quelqu'un l'empêche horrible et bestial ahah cette respiration chaude tu sens et moi la mer est-ce cela un baiser je ne sais pas quelqu'un aide non enlève toi ou non non encore non reste jamais plus fini je meurs !
Toutes les pensées de Blanche s'entrecoupent de ses coups d'œil rapides à Aimbaud, et lorsqu'elle ose lever les yeux à lui elle les referme aussitôt, convaincue donc que c'est lui qui l'embrasse et non elle ; qu'elle n'est rien que l'embrassée, la soumise, la gentille sauvage dont on s'occupe, et que l'on renverra d'un coup amical de main sur la croupe. Oui, Aimbaud l'embrasse, et elle voudrait fuir, elle sent qu'il le faut, elle n'y arrive pas. Pars. Pars. Pars! NON! Non. Non. Elle refuse. Il l'embrasse. Ils se mentent, ça n'est pas interdit, entre peuples ennemis, que de se raconter des balivernes aussi grosses ? Lèvres, lèvres, mentez vous, mordez vous, vous êtes délicieuses.

Un baiser.
Qu'est ce qu'un baiser, après tout ?
Ça n'est rien qu'un début, très fragile et pouvant mener à tout. Et parce qu'elle a peur de se blesser, qu'il lui fasse mal, Blanche se laisse faire et malmener, elle aime ça en plus l'odieuse, elle aime. Lèvres, lèvres !
Originel des prémisses, âgé d'à peine une seconde, cet instant majestueux du début, cette Majuscule à leur relation, ça n'est rien, rien! QUE des lèvres lèvres, et comme c'est fragile il s'agit de ne pas en abuser. C'est un début de relation, ce baiser. Conflictuelle et machiavélique, paranoïaque et jalouse, vouée à l'échec. Lentement, elle se met en place, englobe les deux protagonistes et les change. Blanche n'est plus Blanche, plus seulement. Désormais lorsqu'elle marchera aux couloirs du Louvre et goûtera les mets raffinés de la Cour, qu'elle abattra ses cartes le jeudi soir en riant parce qu'elle triche et gagne, lorsqu'elle chantera pour divertir, lorsqu'elle donnera la main à Charlemagne, lorsqu'elle visitera Thibaut chez ses gens d'adoption, elle ne sera plus seulement la gourmande, la belle ou la dame, ni la mère ou l'amie, elle sera autre. Elle sera couronnée.
L'amante, d'une seconde, d'une parenthèse d'un petit homme. La marche vers son statut de duc. Le pied-de-nez au destin. Son ascension.
Et lui-même, de la même façon, prince de sang, rêveur et adolescent, comme il lui plaira de choisir, il sera un peu de tout, en restant lui, Aimbaud, Aim-baud, deux syllabes, entre ses bras il sera Aimbaud, contre son cou il sera l'amant, contre ses lèvres le magicien, sur les pages le héros, deux syllabes, adulte enfant... Tout se brasse et se mélange dans cet instant unique. Ça n'est rien, ils sont tout.

Un baiser.
Ils sont bien émotifs, ça n'était rien du tout.
Iseult et Tristan se sont bien embrassés, eux aussi, et à ce qu'on sache rien de bien n'en a découlé ! Tout ça, toute cette fadaise que l'amour et la chair, tous ces péchés offerts pour une belle histoire. AH! ça non je ne me laisserai pas avoir ça n'est qu'un rustre un gamin et ses lèvres me font mal il ne sait pas y faire c'est brutal laid idiot je te hais lâche moi appartiens non crève qu'il est odieux, ô Dieu...! Raah, raaah, c'est bestial, il est vulgaire et écœurant, je le hais, je me hais, c'est bestial cette envie-là qui arrive et je me sens fondre ahah c'est bestial je suis un monstre c'est un innocent c'est bestial ne ne quitte pas.
Alors, complètement perdue, elle laisse tomber sa tête contre son épaule et ravale un sanglot qui lui monte dans la gorge. Une plage. L'eau grimpe sur les berges et en recouvre les contours, c'est bien, c'est merveilleux, l'eau nettoie tout. L'eau de mer est salée comme des larmes ; c'est Dieu, ou les Walkyries qui y ont pleuré pour conduire leurs héros au Valhalla d'Odin. Elles sont désespérées, ces nymphes cuirassées, de la même manière que l'autre barbare gwenn ha du, parce que le seul moment où elles ont droit de rester bénies avec leur héros, Dieu... Elles le gâchent pour le mener au trépas.

Un baiser.
Baiser ces lèvres, lèvres ! C'est la mort.
Elle tombe. L'épaule de l'homme est un moule parfait. Elle s'y empreinte.
Un baiser ne vaut rien à ses yeux. Mais à cet instant ultime, rien à foutre, elle a les yeux fermés.


_________________
Aimbaud
... fort plaisant.

... votre guise ...

... puis... reste entre nous...
... simple...
Fermez les yeux...


Quelques éclats de voix murmurés s'échappent de la chambrée bretonne, étouffés par les draperies et les épaisseurs de murs. C'est si ténu qu'il faudrait être versé dans la sorcellerie pour entendre ce qui se dit... Les gens de la maisnie n'en savent rien, les pierres du château, queue d'chi. Le nourrisson dans la chambre adjacente dort à poings fermés. Il apparaît donc, que ce qu'il advient dans l'enceinte de ces quatre murs, se trouve n'avoir jamais existé aux yeux du monde.
Pas de témoin, pas de forfait.
Et qui dit qu'il y a forfait d'abord ? Et qui dit qu'Aimbaud a ramené Blanche jusqu'à sa chambre, la voyant exténuée et perdue ? Et qui dit que vous pouvez avoir toute fiance, en ce narrateur qui vous met dans le doute ? Pas de témoins. Hors donc, ce qui va suivre est vraisemblablement inventé de toutes pièces, une pure affabulation pour entretenir la légende, et histoire de combler les pages manquantes de la biographie des protagonistes...
Vous êtes prévenus.


...

Fermez les yeux.

Elle tremble en lui soufflant ces mots, juchée qu'elle est, sur cette banquette où il l'a faite asseoir un peu plus tôt. Il fait sombre et il fait tard. Il a cru bon de la raccompagner, afin de l'assister dans la montée des marches dirons-nous...

Elle, si vulnérable qu'elle s'est amollit sans force dans ses bras...! La chose fragile. Comme il la respire, et comme il la soutient... Elle l'intimide énormément, quand il prétend à la dominer. C'est terrible, la façon qu'elle a de se reposer sur lui ! Il pourrait la blesser, il pourrait la peiner ! Il sait être cinglant et sans merci, il le lui a déjà prouvé. Pourtant... Elle s'ouvre à lui avec tant de tendresse et d'honnêteté, elle lui offre tant de confiance... La chose fragile. C'est tellement de bonté, qu'il s'en trouve parfaitement en adoration. Elle tendrait un su-sucre qu'il le croquerait.

Il s'enfonce un peu plus dans le satin des coussins, accoudé au mieux pour paraître maître d'une situation qui le dépasse. Sous les boutons qu'il a du échanger, le rythme implacable de son pouls le fait vrombir. Il ne peut plus rien voir, puisqu'il a obéit, mais l'instant n'en est pas moins savoureux... Il peine à croire ce qui lui arrive. Lui qui a toujours du se battre pour mériter ce qu'il voulait, ce jour, une faveur lui tombe du ciel sans qu'il ait rien fait pour l'obtenir... Et quelle faveur, pardon !


Diable..!

Lâche-t'il, alors que son échine de hérisse promptement, jusqu'à lui aiguillonner la nuque. Les mains bretonnes l'ont rejoint. La draperie de ses cheveux bouclés se mêle sur lui. Et la joue, pêche blanche, respire contre son cou par d'infinis souffles, qui peut-être, frémissent un peu...

Chut.

Cela mouille sous l'oreille, avec une pression douce. Le parfum est partout, la chaleur d'un corps aussi. Il est choyé, environné. Il est mieux que bien... Pourtant, il doit se faire violence pour ne pas respirer comme un lapin pris au collet. Les découvertes, ça émeut. Chaque contact est ressentit avec plus de clarté. Froid, chaud, douleur et bien. Elles se décollent de son oreille, les lèvres.
C'est trop, ça le crispe...! Il est d'autant plus chatouilleux quand il est nerveux.
Mais non ! Qu'elle ne s'arrête pas. Il se tiendra coi, il sera immobile. Il fera tout ce qu'elle voudra. Il sera mature, raisonné, à l'écoute, révérencieux, tendre, sociable, obéissant ! Il ne se dérobera pas. Vois, il t'es dévolu. Le reste ne compte pas, il s'en confessera. Embrasse. Serre. Penche-toi encore. Sois celle. Ne prends garde à ce monceau de défauts qui fait lui. Il est piètre bonhomme, mais il s'arrangera pour te plaire.

Là, elle papillonne de droite et de gauche. Il doit inspirer plus en profondeur, dès qu'il la devine à proximité. Elle l'essouffle. Elle volette, cueille le creux d'une joue. Il n'y voit goutte, mais c'est d'autant plus terrible que de la ressentir. Il n'ose plus rien tandis qu'elle le dompte, pleine de malice, le croise et l'aiguille. Elle l'épouse par la bouche, et lui donne une bonne leçon. C'est ainsi qu'on procède, messire de Josselinière, dit son baiser quand elle s'abandonne au présent qu'elle lui fait.
Se produit donc une sorte de Big-Bang très tendre, une implosion doulce et — contre toute attente — sereine, pour l'Aimbaud, qui cesse d'avoir des palpitations comme un couillon, pour se laisser aller, guidé on ne peut plus savamment par les lèvres amies. C'est inné, faut croire. Ça coule de source. C'est frais. On entend plus rien d'autre que ce qu'on ressent. Bon dieu, en somme ça lui plaît...

Ne pense plus, Josselinière.

Qu'importe l'immoralité. Tu tiens contre toi une idole. Elle t'est tout... Tant elle est belle et gente... Elle grimpe et grimpe en toi comme le vin, quand il est fort. Elle te tue. Tu l'as veux garder cadenassée contre ton sein, la païenne. La meurtrir doucettement... À toi. Rien qu'à toi. Tu la tiens, et c'est bon... Quelle chance tu as, demeuré, là... recroquevillé parmi la soie, figé dans un vilain frisson d'appétence, qui remonte, remonte, des reins jusqu'à la racine des cheveux. Est-ce...
Est-ce que c'est mal ?
Pas un geste. Haut les mains.

Ne pense plus.

Tu tiens dans tes bras, une reine.

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