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[RP] Et la mort n'aura pas d'Empire

Valezy
Les pluies antédiluviennes qui s’abattaient sans vergogne depuis plusieurs jours sur les terres habituellement ensoleillées d’Armagnac avaient transformé en ruisseau de boue les modestes chemins de terre qui conduisaient jusqu’au castel d’Antras. Et seul le fracas assourdissant du tonnerre parvenait à faire taire, pour de brefs instants seulement, le hurlement d’un vent glacial qui emportait sous son souffle les dernières feuilles mortes d’un hiver qui touchait à sa fin.

Face à ces déchaînements de la nature, un étrange cortège tentait tant bien que mal de se frayer un chemin jusqu’à la promesse d’hospitalité matérialisée par les froids murs de pierre qui ceignaient la demeure du maître des lieux…

Et pourtant, semblant bien loin de cette agréable pensée, le visage, tout comme la mise, des hommes d’armes portant la livrée de la maison des Emerask semblaient des plus mornes. En effet, ces cavaliers faisaient bien pâle figure, presque tout autant que ce chariot qu’ils escortaient et qui à chaque lieu franchit manquait inlassablement de s’embourber dans la fange.

Dans l’habitacle du véhicule, une silhouette s’était drapée dans une lourde cape de laine noire pour mieux se protéger des intempéries, ne révélant ainsi sa mine que lorsque l’aveuglante lumière des éclairs déchirait l’obscurité des cieux.

A cette occasion, un hypothétique témoin aurait ainsi pu apercevoir Gaspard, le fidèle serviteur du seigneur d’Antras, arborant un teint livide et des traits tirés. Sa mâchoire était fermée, ses pupilles rendues rouges et à dire vrai seuls les torrent d’eau qui s’abattaient sur lui parvenaient à dissimuler les larmes qui coulaient le long de ses joues burinées.

Le nain posa alors une main sur son épaule, effleurant par la même la plaie béante qui y prônait. Un grognement sonore s’échappa de ses lèvres.

Comment cela avait il été possible?

Cette pensée résonna en son esprit comme un cri chargé de colère et de rage tandis que son regard effaré se posa sur l’arrière du chariot. Là, sur les planches de l’attelage, avait été déposé un corps emmitouflé de tissus…

Irrégulièrement, les étoffes se relevaient… Et c’était le seul et infime indice qui indiquait que la faucheuse n’avait encore point réclamé son dû… Le seul signe qu’un espoir était encore permis.

Il vivra…

Et le nain se retourna avec conviction vers ses compagnons d’infortune pour déclamer.

Hâtons nous… Où il nous fera payer de l’avoir laisser là plus que nécessaire.

Quelques jours plus tard, un messager vint porter une missive au castel de la baronne de Lignières. L’écriture qui constellait le vélin était nerveuse et écrasée, de nombreux mots avaient été raturés et corrigés. Mais l’ensemble n’en restait pas moins lisible.


Citation:
« Baronne,

Il n’en aura fallu pas moins pour me pousser à vous écrire et à passer ainsi outre l’orgueil de mon maître.

Sachez que Valezy fut victime d’une lâche attaque. Des brigands auront eut raison de lui.

N’omettez pas de dire à son fils que nombreuses sont les herpailles à l’avoir précédé dans sa chute.

Aujourd’hui, il est aux portes du royaume solaire et ne devrait point tarder à rejoindre le Très Haut. Les rebouteux n’auront rien pu faire.

Il me semblait légitime que son épouse et son enfant soient mis au courant.

Gaspard. »
--Le.cavalier.noir
Dans le bosquet à l'abri des regards le canasson à la robe noir se mouvait lentement sous les cordes.
C'est que le ciel savait choisir la force de ses larmes pour cacher la perfidie de ses actes.
Et aujourd'hui s'était déluge sur terre. Heureusement lui n'était que de passage.
Le chemin boueux ne marquait pas ses empruntes. Comme une légèreté qui flottait dans l'air
Sur lui un cavalier au cuir aussi noir que la croupe. Un attelage d'un autre âge.
Un rictus insolant sous l'œil pétillant parce que la légende ne fut jamais autrement.
Parce que l'ombre n'oublie jamais que c'est avec le salut des siens que débute les grands voyages.
Alors que ca n'en déplaise mais il fallait être la. La chasse aux marauds serait pour plus tard.
Il regardait le corps qui bringuebalait sur la charrette en route vers les hautes murailles.

C'est donc en ce lieu que tu avais trouvé refuge ?

Ils auraient pu monter les trébuchets et dresser les tentes. Du cœur des feux de camps auraient montés les chants.
Ceux de Bourges ou de Vendôme. Ceux qui dans les plaines glacèrent le sang des plus vaillants.
Les couplets auraient contés l'histoire d'un jeune brave qui l'épée à la main chargea de toute sa vaillance leurs arrogances.
Mais contre les murs ne frappait que le vent et raisonnait le tonnerre comme pour marquer le temps.
Peut être que trop d'entre eux s'étaient perdus dans ces jours de colères où s'ouvrent les portes de l'enfer.
Le cavalier rectifia d'une main agile le galure. Il était l'heure de continuer la route.
Car ceux qui font la légende la rende éternelle et parce que le Mal pour le Bien est une lutte sans fin....
Tournant la bride le canasson partit à bride abattue dans la brume. Vers une nouvelle chevauchée pour de nouvelles aventures.


Johanara
En violet, les souvenirs.

Un été heureux. Eauze. 1457.

"Et ta joue sur ma joue comme un jardin secret..."

Dans l'ondée verdoyante de la clairière de Saint Lys, la brise légère disperse les secrets de deux amants. Les mirettes de la jeune noble sont emplies de piété tandis qu'elles caressent le visage d'éphèbe qui s'est lentement tourné vers elle. Avec douceur, la dextre de l'homme cueille une fleur sauvage et la glisse avec délicatesse entre les longues boucles flamboyantes.

Mon adoré, mon idéal. Je n'ai vécu que pour ces instants à tes côtés. Ta bouche, ton adorable bouche me conte des histoires éternelles et le ciel aujourd'hui est bien jaloux de l'Azur de tes yeux. Est ce que tu sens les nuages à nos semelles, à chaque fois que nos doigts s'entremêlent?

Il lui sourit. Son coeur se serre, son âme vascille. Dans mille ans, elle l'aimerait encore, et comme Tristan et Iseult, les légendes loueraient leurs noms.

Terres de Lignières, Berry. 1459.

"Les Baronnes se cachent pour pleurer."

Les prunelles émeraudes brillaient d'une angoisse nouvelle. Valezy se mourait... Et ce monstre d'orgueil n'avait pas même daigné prendre la plume. Le velin froissé au creux de la paume liliale se couvrit de perles salées tandis que la courbe amarante des lèvres se perdit en un rictus cruel.

Qu'il crève seul, ce mufle qui a abandonné femme et enfant.

Et pourtant quelques heures plus tard, le Castel de Lignières était en branle. Le jeune héritier ne tenait plus en place, heureux de partir en goguette avec sa mère qui à l'accoutumée préférait courir les routes en compagnie de son amant. Johanara n'avait pas encore trouvé le courage de lui dire qu'ils allaient veiller son père mourant. Ses rires et les étreintes affectueuses qu'elle prodiguait à son fils dissimulaient un immense désarroi. Alexander du haut de ses quatre ans comprendrait il qu'il rencontre son père pour la première et la dernière fois de son vivant?
Devait elle lui infliger cette épreuve? Continuer de lui conter des histoires rocambolensque sur un grand guerrier qui les aimait très fort mais qui se battait loin d'eux? La bouille angélique et rieuse de son fils arracha un sanglot muet à la Baronne qui se réfugia dans son boudoir feutré griffonner quelques lignes pour prévenir de son départ et laisser des rivières nacrer le satin de sa peau.


Caserne d'Eauze, 1456.

"Deux êtres qui s'aiment se rencontrent toujours. "

Le soldat la regarde, légèrement intimidé. Elle fulmine, ses grand yeux lancent des éclairs.

Le Capitaine trouve que j'ai baclé mon rapport? Et qui est ce muflaud? Valezy d'Emerask? Comme voilà un nom ridicule. Menez moi auprès de lui, je vous prie. Et fissa.


Connétable de l'Armagnac alors, c 'est une rouquine furieuse qui pénètre dans l'office du jeune Capitaine auvergnat. L'ire s'éfface bientôt et les pétales vermeilles s'arrondisent de stupeur.
Un Apollon la fixe, plein de morgue.


C'est vous la Berrichonne qui sait pas compter deux épées et trois boucliers?

Hein? Et votre soeur elle sait compter...?

Il est sublime. Ses cheveux cuivrés dissimulent un regard céruléen. Les pommettes s'empourprent tandis que la palpitant s'emballe au rythme harmonieux et nouveau de la passion.



Sur la route. 1459.


Alexander Romaric s'était endormi au creux du giron maternel. La Baronne caressait la masse de feu nichée dans le sillon de son opulante poitrine.
Valezy...
Etait il possible que son époux qui avait soufflé le chaud et le froid sur sa vie cesse de provoquer des tempêtes d'amour ou des raffales de haine en son être?
Presque un an de silence. Elle était folle d'amour pour un autre à présent.
Valezy...
Son premier amant. Son mari. Le père de son enfant. La cause de cette douleur lancinante au coeur et à l'âme certains soirs d'hiver. Elle avait souhaité sa mort. De tout son être. De toutes ses forces. Et qu'il souffre mille tourments. A présent que ses souhaits semblaient être sur le point d'être exaucés, elle se sentait coupable. L'Adultère, les prières infâmes, l'enfant disputé comme un caprice...
Des vers et des larmes.

"Un ange a déployé ses ailes de lumière
Sur la nuit de mon coeur longtemps martyrisé
Je goûte à ses paupières le soleil des damnés
Et sa Bonté m'innonde de clartés éphémères

...Car comme les papillons qui fanent à l'hiver
Les soleils d'ailleurs disparaissent en secret
Laissant les rivières sèches de larmes par milliers
Et s'éteignent les étoiles du fond des univers.

Pauvre étoile, pâle guide dans la noirceur voûtée
Faut il que pour briller tu restes solitaire
Ton éclat rend jaloux les cieux d'après l'été
Les fleurs du plus beau rouge éclosent dans tes prières

Je prie mais l'ange déchu n'est plus qu'une tendre plaie
Les amours de juin jamais ne fleuriront
J'aimais par dessus tout tes bras telle ma maison
Et l'odeur de ta peau comme une rose trémière."


Antras. Depuis combien de temps la Baronne n'avait elle pas visiter ses gens et son Château?


Faites annoncer la Baronne de Lignières.

_________________
Alexander_d_emerask
Sur la route...

Endormi sur les genoux de sa mère, bercé par les cahots de la route, le petiot rêvait.
Heureux de partir sur les routes avec sa chère maman, il avait toutefois du se résigner à quitter sa nouvelle amie, Lara pour quelques jours.
Elle était donc l'un des personnages principaux du rêve du petit rouquin.
Ils jouaient ensemble, bravant les dangers (et les interdits!), courant dans la nature ou dans le village. Se faisant gronder par Choose...
La bouille de l'héritier se barra d'une grimace mêlant peur et vexation.
Elle lui faisait toujours un peu peur, la diaconesse sous ses airs austères et ses accès de sévérité, mais il savait aussi qu'elle avait beaucoup de tendresse pour les enfants (seulement quand ils obéissent).
Puis il y avait d'autres personnes, dont la nourrice, enfermée dans le buffet, avec les confitures.
Il esquissa un léger sourire.
Ça, on pouvait dire qu'il vivait ses rêves, ses petites mains s'ouvrant et se refermant aussi de temps à autres.
Sa grande copine Zephyrine, était là aussi, déguisée en sapin de Noël.
À cette vue, un grand sourire s'afficha cette fois sur son visage endormi
mais soudain,il sentit quelques gouttes de pluie, il fallait rentrer s'abriter... Fin du rêve.

La voix enrouée et les yeux dans le brouillard, il releva la tête pour s'adresser à sa génitrice.


M'man, il prend l'eau, le carrosse!

Il n'eut pas le temps de fixer son regard sur les larmes qu'elle effaça rapidement de ses joues.
Sortie brusquement de sa torpeur méditative, elle avait toujours le réflexe de sauver les apparences, surtout en présence de son fils.

Pour éluder le sujet, elle lui montra le château qui était maintenant en vue, et il était temps...


J'dois faire pipi!
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--Valezy
Les volets avaient été clos et seuls quelques braseros parvenaient à faire reculer l’obscurité dans laquelle la chambre du Seigneur d’Antras avait été plongé. Le maître des lieux était alité, rendu méconnaissable par de longs jours d’agonie.

Son corps était émacié pour ne pas dire décharné, son visage crispé affichait une pâleur morbide, ses cheveux de feu étaient collés à son front par les suées qui ne manquait de le saisir à chaque instant.

Oui, il n’en avait plus pour bien longtemps…

Cette douleur lancinante qui déchirait son ventre, à l’endroit même où il avait reçu le fer acéré d’une pique, ne cessait de le lui rappeler.

Néanmoins, il avait refusé tout les narcotiques, et autres calmants, proposés par les chirurgiens. Après tout, la mort et la douleur avait été pour lui ses plus anciennes et ses plus fidèles amantes, pourquoi leurs aurait il tourné le dos aujourd’hui alors qu’elles étaient venus le chercher?

Son corps avait beau être brisé, anéanti, sa volonté, elle, restait intacte comme le démontrait son regard inchangé, toujours aussi froid et arrogant. Oui, en cet instant, seul une volonté, aussi dévorante que les flammes, parvenait à le maintenir en vie… Mais pour combien de temps encore?

Sa voix rendue faible et rocailleuse s’éleva alors à l’adresse du nain à l’épaule bandée qui se trouvait à son chevet.


As-tu bien compris? Lorsque tout sera fini, ce sera ta dernière tâche…

Et ses yeux aussi bleus que les cieux s’attardèrent sur les trophées de guerre qui décoraient les murs de la pièce. Armes, écus et gonfanons… Tous pris sur le corps de ceux qu’il avait par le passé vaincu… Qu’ils soient brigands ou ducs. Lui qui avait mené tant d’hommes à la guerre, qui avait brisé tellement de vie. Quelle ironie… Aujourd’hui était venu son tour. Mais pouvait il rêver de meilleur fin? Il était tombé
l’arme au poing, comme il l’avait toujours désiré.


J’aurai du en rester là au lieu de céder à une vie d’indolence… Je n’aurai alors jamais connu de déceptions, je serai demeuré invincible…

Mais cela n’a plus d’importance. Tu prendra l’épée familiale et tu n’aura de cesse tant que tu n’aura pas trouvé un homme digne de la porter, un homme qui ne commettra pas les mêmes erreurs que moi, un qui non content de me succéder, me surpassera.


A ses mots, les yeux de Gaspard se plissèrent.

Pourquoi pas votre fils, maître?


Un semblant de rire, vite étouffé par un gémissement de douleur, lui répondit.

Avec l’éducation que lui fournira sa mère, il sera au meilleur des cas, un courtisan efféminé. Voila raison suffisante…

Et la réplique fut ponctuée par un nouveau gémissement.


Cela suffit… Du repos!


Mais à peine eut il prononcé ses mots que l’une de ses jeunes et désirables servantes, dont il s’était soigneusement entouré ces derniers temps, fit son entrée pour annoncer l’arrivée de visiteurs. Sa femme et son fils…

J’aurais du m’en douter, la garce, elle est venue se repaître de ma mort… Après mon cœur, mon fils et mon honneur, elle en voudra même jusqu’à mon dernier repos.

Et ses mots se transformèrent en sifflement.

Gaspard, renvoie les. Par la force si nécessaire!
************************************************************

Quelques minutes plus tard, le valeureux nabot, escorté de deux hommes d’armes vint se présenter devant la baronne et son héritier.

Et bien… Quelle audace! Il ne fallait point voir en ma lettre, une invitation, tout au contraire. Vous n’êtes point la bienvenue en ces lieux.

J’imagine sans peine que vous êtes venus réclamer votre héritage. Mais ayez au moins la décence d’attendre à Eauze la mort de mon maître pour se faire. Je ne vous montre pas le chemin.


Et la main du fidèle parmi les fidèles se posa sur sa hache d’arme comme pour mieux souligner la teneur de ses propos.


(Posté pour Ljd Val qui n'a plus accès au forum )
Johanara
Antras, 1459.

"Vous ne passerez pas! "[Le Seigneur des anneaux]

La salle d'eau du premier étage permit à notre rousse baronne et à son marmot à la vessie farceuse de se rafraîchir. Johanara dans un élan de coquetterie, troqua même sa tenue de voyage sobre et confortable contre l'une de ses toilettes ivoirines et surpiquées de perles ou de dentelles fines qui lui donnait des airs de madone antique. Un peigne d'opale fut glissé dans la luxuriante cascade de boucles.

Certains domestiques poussèrent quelques criements de stupeur en l'apercevant traverser les corridors , la senestre tenant fermement le petit seigneur, en direction des appartements du Châtelain. D'autres, ne l'ayant jamais vu, se pressèrent autout des embrasures et des portes afin,d'observer cette grande rousse au port altier et au regard céleste.

Gaspard vint bientôt à sa rencontre, sa lourde hache vissée à son épaule. Deux gardes l'entouraient, de ceux qui l'avaient servi aussi fidèlement qu'ils servaient le Baron à présent.
Arquant un de ses jolis sourcils fauves, la Dame de Saint Lys accueillit le discours du nabot tout d'abord avec perplexité.
Mais lorsque les deux larges miroirs de jade croisèrent le minois attristé du petit d'Emerask, qui comprit aisément qu'on les traitait sa mère et lui comme des malpropres, le sang lui battit les tempes et son joli nez moucheté de quelques tâches de son se fronça de courroux et d'indignation.


Plait il? Toi, vile fripouille, engeance malfaisante d'un nain de jardin et d'une polly pocket tu oses t'adresser à moi en ces termes et me menacer physiquement? Je suis TA maîtresse, autant que ce lâche qui se cache derrière sa mort pour déshonnorer une fois de plus les liens du mariage et de paternité.

Ceux qui connaissaient Johanara savait qu'elle avait le coeur le plus doux et le plus clément de toute la Création. Ceux qui la connaissaient vraiment savaient que sous ses airs angéliques et ses grands yeux de biche effarouchée, se cachait une femme passionnée au caratère volcanique ce qui en faisait soit dit en passant une amante enchanteresse.

Je suis ici chez MOI. Tu as sans doute oublié les années passées à te vautrer à Lignières en compagnie de mes servantes. Ce qui appartiens à ton maître m'appartient également. Hausse encore une fois le ton et je te fais pendre, misérable lombric barbu. Quant à ce stupide héritage, oublies tu que je suis la Baronne de Lignières? Que mes terres s'étendent bien que plus loin que celles de ton seigneur, que j'ai fait une mésallience et que je vais t'éclater la trogne si tu ne t'adresses pas à mon fils avec le respect qui lui est dû par son rang!

Toisant le nain avec mépris, la belle se planta soudain face aux deux gardes. Et de continuer son monologue.

Toi! Qui tenait la main de ta femme quand elle mettait au monde son dizième lardon? Qui doublait tes gages lorsque les récoltes étaient mauvaises et que tu pleurais telle la dernière des donzelles parce que tes enfants crevaient de faim? Et toi! Qui a pris à son service ta cousine, cette petite puterelle vérolée dont personne ne voulait à son office? Qui a fait de cette fille perdue un chambrière respectable et vertueuse? Qui vous a aidé? Cet auvergnat fier et arrogant ou moi votre Baronne dont vous prétendez à présent barrer le passage?

Honteux , les deux gardes s'écartèrent. Johanara avait toujours été bonne pour ses gens au contraire de Valezy dont la sufficance et la vanité l'avait conduit à ignorer la plupart des domestiques. Et elle l'avait aimé pour ça aussi... Cet air de roi qui commande au commun des mortels...

Quand à vous mon fils, n'oubliez jamais qui vous êtes. Tout ici vous appartiendra un jour. Et les terres et les gens. Traitez les avec respect mais pourfendez le premier qui se croit votre égal. Vous allez dire Adieu à votre père qui est très malade.

Prenant son fils contre elle, Johanara franchit en quelques enjambées la distance qui la séparait de la couche où son époux agonisait. La menace de la hache sifflait au dessus de son chef mais elle resta digne et roide. Par heur, Gaspard demeurait interdit au seuil de la chambrée.
La vision du farouche guerrier, livide et décharné, arracha à Johanara un hurlement d'horreur. Ses mains comprimèrent sa bouche purpurine avec force. Elle tomba à genoux, au pied du mausolée, aussi blême que lui, prise de quelques tremblements.


Lignières , Avril 1456. Nuit de noces.

" Les nuits sans Lune, les ombres bleus que le désir dessine éclairent le Firmament..."

La vision du beau seigneur dans son simple appareil arracha à la jeune pucelle un petit cri d'admiration. Apollon réincarné était descendu du Mont Olympe pour lui apprendre l'Amour et la Passion. Ses mains caressèrent le corps musculeux et ambré de son époux avec ferveur. Elle tomba à genoux, empourprée par la vive émotion qui s'était emparée de tout son être tremblant...


Antras, 1459.

"Ce n'est pas une mine... C'est un tombeau!" [Le Seigneur des Anneaux]

Comme son fils la fixait, elle l'enserra fortement par les épaules et le serra contre son sein. Quelques secondes plus tard, son regard était de nouveau limpide et elle donna une petite tape d'encouragement dans le dos de l'enfançon:

Allons. Saluez le Baron de Lignières, valeureux chevalier tombé au combat et priez Aristote d'être digne de son courage et de sa force. Votre père est un héros, souvenez vous en.

Sa voix se brisa sur les derniers mots tandis que Valezy la contemplait comme si elle fut quelque sorceresse venue l'arracher au repos éternel.
_________________
--Valezy
Malgrès ses consignes, Valezy ne tarda pas à contempler l'entrée fracassante de son épouse et de son fils dans ce qui allait devenir la dernière demeure de son vivant. Son regard céruléen s'attarda alors sur la femme qui, pour la morbide occasion, avait revêtu des atours qu'il ne lui connaissait pas.

Elle était toujours aussi belle...

Et cette vision suffit à faire ressurgir en lui des souvenirs qu'il avait cru enfouit à jamais dans les limbres de l'oubli. Avait il jamais autant aimé qu'il ne l'avait aimé ? Avait il jamais autant haï qu'il ne l'avait haï ? En cela, il fallait bien avouer que leur relation ne manquait pas d'une certaine ironie.

Le mourrant porta alors une main à son ventre meurtri, tandis qu'il mobilisait ce qu'il lui restait de force pour se redresser tant bien que mal sur sa couche. Ses dents se serrèrent pour retenir le gemissement de douleur qui manqua de franchir ses lèvres.

En aucun cas, il ne devait se montrer plus faible qu'il ne l'était en cet instant, il en faisait une question d'honneur.

Maudit incapable... On ne peut décidément compter sur personne...
Mais quel bon vent vous amène Baronne?


Il n'eut cependant pas la temps d'obtenir une réponse que sur ordre de sa mère son fils s'approcha de lui et son regard se fit inquisiteur en contemplant cet enfant qu'il n'avait vu qu'une seule fois... Lors de sa naissance, il y a si longtemps déjà.

Voila donc, le fameux Alexander Romaric? Vient donc plus près mon fils.

Et se faisant, sa destre s'éleva pour ebouriffer, non sans affection, la rousse chevelure de son interlocuteur.

Tu ne manques pas de beauté... Mais comment en aurait il pu être autrement? Quelle misère que nous nous voyons en pareil occasion, j'ai bien peur de t'offrir un piètre souvenir de ton père. Tel spectacle est indigne d'un enfant de ton âge.

Ses dires furent ponctués d'une toux sèche qui lui sembla déchirer plus encore son corps.

Mais dis moi, aimes tu les jouets?... Quelle question, c'est là le cas de tous les enfants, n'est il pas?

Un doux sourire se dessina alors sur ses lèvres chassant par la même pour un bref instant ses souffrances.

Vois tu la malle là bas près de l'étagère? Va et ouvre là, tous ce qu'elle contient t'appartient désormais.

Et il regarda avec un plaisir non feint, Alexander trotter vers le coffre. Depuis sa naissance, son père n'avait eut de cesse de lui commander des jouets aux artisans locaux... Il y trouva ainsi des épées de bois laqués dont le réalisme était saisissant, des petits soldats métalliques dont chaques détails avait été soigneusement restitués, des balles aux couleurs vives et autres merveilles...

Par fierté, mais aussi par honte, il n'avait toutefois jamais trouvé la force d'aller les lui offrir auparavant... Mais après tout, mieux valait tard que jamais.

Et tandis que l'enfant prenait possession de son nouveau trésor, son regard se détourna vers la jeune femme rousse... Et toute trace de joie s'effaça de son visage.

Ainsi, vous êtes venus vous repaître de ma présente situation? Je suis fort étonné que vous n'ayez point emmené vos amants... Plus on est de fous, plus on rit.

Quel étrange spectacle qu'offrait le seigneur d'Antras en cet instant. Pathétique spectre blanc de souffrance qui n'en trouva pas moins la force pour ancrer ses yeux luisant de mépris et de dégout dans le regard de jade de celle qui avait été son adoré... Comme si sa simple volonté était en mesure d'ecraser son adversaire du jour... Son dernier ennemi.

Mais soit mirez, admirez, contemplez... Le spectacle d'un homme qui s'apprête à rencontrer le Très Haut. Et gardez toujours à l'esprit que ce dernier, tout comme moi, n'oublie rien. Pour moi le soleil. Un jour prochain, pour vous, la lune!
Johanara
Antras . 1459

«Ces deux morceaux de ciel où j’aimais tant mirer
Et l’azur et le miel, et l’hiver et l’été. »


Les mirettes émeraude se plissèrent imperceptiblement lorsque Valezy ébouriffa les boucles cuivrées de son fils. Cette image se devait de rester gravée en elle pour les futures nuits d'orage où son fils viendrait se réfugier dans ses bras, quémandant qu'elle lui parla de son père.

Et elle n'aurait pas à lui mentir cette fois ... Car Johanara l'aurait juré, les prunelles safre de son mari étincelaient d'amour et de fierté tandis qu'il montrait à Alexander le coffre à jouets.

Mais tandis que l’enfant s’éloignait , trop heureux de découvrir ses nouvelles merveilles, le regard de son époux se durcit et bientôt ses jolis yeux bleus ne furent plus qu’un abîme de haine et de rancœur.


Sur les routes où l’errance du bonheur. 1457 .

« Tes yeux sont si profonds que j’y perds la mémoire. » [Aragon]

Elle pose ses mains sur celles de son époux. Il lui enserre le visage et la regarde sans un mot.

Ses yeux sont incroyables. Bleus. Purs. Elle y voit défiler les nuits où leurs corps enchaînés défient les lois de l’espace et du temps.


Je veux porter ton enfant Valezy. Que ton amour inouï inonde mes entrailles… Ta lignée aura un héritier et moi j’aurais un autre être à chérir, car la Passion que je te porte est bien trop grande, bien trop folle, bien trop dévastatrice pour ne point être partagée.


Antras. 1459

« Dans le ciel de tes yeux, se couche le Soleil des Mourants… »

Longtemps encore son regard de spectre glacé la hanterait .Jamais elle ne devait oublier ce corps décharné qu’elle avait jadis serré contre son sein.

Ne dîtes plus rien. Je sais le mépris qui vous habite. Vos yeux, vos larges yeux n’ont jamais su mentir. Je suis heureuse que notre fils soit icelieu. J’ai souvenance de cette balancelle où je somnolais certains après-midi de chaleur accablante. J’étais si grosse… Enorme même. Les cordages ont tenu bon pourtant… Et ce petit est une bénédiction.

Légère pause.

Il vous ressemble tellement. Plus qu’à moi. Ce sont vos yeux, vos fossettes, votre bouche. Vous vivrez des années encore à travers lui. Et votre nom ne franchira mes lèvres qu’avec respect et affection.

Il vous ressemble n’est-ce pas ? Comme c’était ridicule de penser que vous n’étiez point son père. Ridicule et impossible…
Certes je vous impose ma présence. Mais il fallait que je vous mène Alexander.

Je vous cherche parfois dans un demi-sommeil à ma gauche. Vous dormiez toujours à ma gauche…
Pourquoi dormiez-vous toujours à ma gauche ?


Nerveuse, un léger ricanement franchit le corail de ses lèvres. Cette fois, l’épreuve était trop grande. Elle ne s’en relèverait pas.

c'est pour ce soir, je crois, ma bien-aimée !
j'ai l'âme lourde encore d'amour inexprimée,
et je meurs ! Jamais plus, jamais mes yeux grisés,
mes regards dont c'était les frémissantes fêtes,
ne baiseront au vol les gestes que vous faites ;
j'en revois un petit qui vous est familier
pour toucher votre front, et je voudrais crier adieu !
mon coeur ne vous quitta jamais une seconde,
et je suis et serai jusque dans l'autre monde
celui qui vous aima sans mesure, celui...[Rostand]

_________________
Johanara
Antras. 1459.

« Dans mon chagrin, rien n’est en mouvement
J’attends, personne ne viendra
Ni de jour ni de nuit
Ni jamais plus ce qui fut moi même.

J’étais si près de toi que j’ai froid près des autres. » [Eluard.]


Elle ne saurait jamais.

Les lèvres blêmes de Valezy s’étaient écloses sur le néant.
L’on fit venir un mire, un prêtre, un croque-mort. Et Johanara tel un spectre, étrangère à ce qui se passait autour d’elle, restait prostrée près du corps, tenant entre ses mains liliales un chapelet et une sainte croix.

Lorsque la cloche sonna les Vêpres, rien ne semblait pouvoir la sortir de sa léthargie contemplative. Ses grands yeux rivés au visage froid ne s’en détachèrent ni pour son fils, ni pour ses gens.

Soudain la jeune femme se leva et écartant le médicastre d’un geste brusque se pencha sur la dépouille et défit les pans de la tunique azurée. Portait il encore la médaille qu’elle lui avait offerte et dont elle gardait la jumelle à son cou d’albâtre ? Celle la même qu’elle mirait certaines nuits lorsque la solitude et le désarroi l’accablaient…


Eauze. 1456.

Prenant dans ses mains un petit écrin , elle le lui tendit les joues imperceptiblement empourprées.

Il pût découvrir un médaillon fait d’ambre viride que retenait une lourde chaîne admirablement ouvragée. Dans l’ambre , représenté symboliquement par quelques lignes gracieuses , une iris , fleur aux multiples significations : « Vos yeux m’affolent » , « Vous enchantez mes jours » , « je vous aime tendrement » , « je brûle d’amour pour vous ». Certaines s’avéraient être le reflet de la réalité , d’autres ne sauraient tarder à l’être …


Bienvenu à Eauze, tu m’as fait une immense joie en venant t’installer ici , j’ai voulu te remercier par ce petit présent…

Baissant les yeux de peur de lire dans les siens quelque consternation , elle attendit sa réaction sentant sa poitrine se soulever à chacune de ses respirations faisant s’agiter imperceptiblement le médaillon qui logeait entre ses formes voluptueuses sous le fin tissu de son corsage et qui était presque identique au sien , si ce n’est que l’iris avait des courbes plus féminines la faisant ressembler à ses grands lys qu’affectionnaient tant Johanara et qui ornait son blason. [Rp partage, « Impasse Eluzate » ]


Antras. 1459

Qu'avait elle découvert alors que ses longs doigts délicats couraient sur le torse sans vie? L'auvergnat avait il conservé sur son poitrail le penticol d’un vert doux et cristallin ?
Un criement franchit la barrière corail des lèvres barronesques.


Sortez! Sortez tous! Quittez ce Castel! Je veux rester seule, vous entendez? Seule!!!

Lorsque tous quittèrent la chambrée sous les hurlements d'une Baronne rendue hystérique, cette dernière s'empara d'une paire de ciseaux d'argent dans l'office de l'ancien Capitaine. Revevant vers la dépouille, elle défit avec frénesie les longues tresses de feu et d'or qui retenaient l'opulante cascade de boucles rousses.
Jamais femme n'avait porté pareille couronne. Sa chevelure ondulait jusqu'aux courbes de ses cuisses. Bientôt le corps du seigneur fut recouvert de larmes et de boucles flamboyantes.

Johanara venait de sacrifier son plus bel atour sur l'autel du chagrin et du courroux.

Ployait elle sous les remords? Avait il gardé durant ces longues années de séparation cette médaille, vestige de leur amour à nul autre pareille et de l'affection qu'il portait au plus profond de son coeur à cette femme qui n'aurait jamais voulu avoir à fermer ses yeux ? A contrario avait elle compris que son époux n'emportait d'elle que le souvenir d'une garce frivole et qu'il ne regrettait en rien d'avoir abandonné sa famille?


Je n'ai connu qu'une histoire d'amour,
Au fil de ma vie,
Cet homme m'a promis les toujours,
Et puis s'est enfui.
C'est la couleur de l'enfer
Quand les mensonges salissent tout
J'aurai pu sombrer sous la colère,
Comme un cheval fou.

C'est une douleur sans égal,
Quand sa vie,
part en étincelles
J'aurai pu vendre mon âme au diable,
Comme un criminel.

Mais ce qui m'a sauvé c'est de pouvoit aimer...


Une semaine plus tard.

La Baronne apparut dans le salon, vêtue de blanc comme l'exigeait le Deuil. Une guimpe de dentelle immaculée couvrait ses cheveux roux qui bouclaient autour de son chef comme ceux d'une toute jeune enfant.

Nous rentrons. Déposez une fleur sur la tombe de votre père et cessez de chouiner Alexander.

Souvenez vous qu'il est votre sang, qu'il est le pourquoi de votre cran, qu'il était grand et qu'il faudra qu'on lui ressemble.


Un nouveau sentiment souleva son âme abbatue par la folie, le désespoir et les regrets.

La Liberté.

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