Laudanum
[L'Artois où quand la hanche est en grève.]
A l'aller elle se trouvait simplement témoin. Témoin d'un rescapé, à demi éclopé, elle aurait du y voir un signe, en bon augure. Mais non, simple procédure, laissez passer et tout le tintouin, sans-papiers, tu fous le camp de là. Ici, on prône "l'identité ducale".
Moui, bon, après tout on ne fait que passer, et...c'est ce que fit le blond.
Il passa...
Pas d'anguilles en Flandres, que des morues, et quelques carpes pleines d'arêtes. Tout un programme pour le poison brugeois, qui ne demandait qu'à jeter ses filets dans le lac, pour y pêcher quelques écailleux. Elle les viderait à loisir, et si elle n'y verrait pas l'avenir, au moins les ferait-elle rôtir, au feu de bois.
Et c'est qu'il en tomba des carpes, des bouches rondes ouvertes, mâchoires en extension et yeux exorbités, il en pleuvait dans chaque ruelle de Flandres. Et des murmures aussi.
Crénom d'un chien*, l'empoisonneuse est de retour!
Quelques uns fuyaient, d'autres se signaient, et les Loreals se marraient.
Bruges avait un peu la saveur d'une friandise. Plaisante, douce au palais et familière.
Le chauve au cheveu unique, les Vygnards que l'on rêvait de pendre, des voisines loréaliennes aux contes de quatre sous, et des morues fraîchement débarquées qui n'attendaient que le venin du poison pour paralyser leurs convulsions désespérées.
Il n'y manquait qu'un parfum de folie ordinaire, un atome d'évidence qui avait bel et bien disparu.
Mais la Venise du Nord attirait toujours. Aventuriers de pacotilles, ou candidats au suicide. Le lac était froid en cette saison, l'on pouvait s'y noyer, ou s'y geler le sang, au choix.
Restait la corde aussi.
Parfait instrument de libération pour un sybarite piégé jusqu'aux os, par une brune grosse jusqu'au cou.
Tout ce que voulait le poison, c'était le trésor promis par la pancarte. Et puis ces deux qui rôdaient là constamment. Forcément, ils avaient du trouver le magot.
D'entrée, elle annonça la couleur.
"Filez moi l'or, où crachez l'endroit de la planque". Même pas eu à menacer, que le brun lui indiqua où creuser.
S'il mentait, elle lui ferait payer, qu'elle répondit.
Et lui qui souriait, même pas peur. Elle en aurait été vexée, s'il n'avait eu l'art d'accommoder le poison.
Prise à contrepieds, à défaut d'être pendue par ces mêmes pieds, elle n'en menait pas large. Elle coulait dans ses veines avec la plus odieuse des sournoiseries, grisée par la grisaille elle-même, qui riait de son âme noire, enivré sans doute par un cinglant m'enfoutisme, ou juste fou.
Bruges abritait en son sein un empereur, et son futur chiard.
Elle en était arrivée à cette constatation, se demandant comment elle s'était débrouillée pour se foutre dans pareille équation. Elle avait beau s'inspecter la carne, pas de x, ou de carré collé au cul.
Mais bon sang!
Elle était là la réponse!
Au hasard d'un croisement, plutôt en V qu'en croix, ils firent un bout de route ensemble, de moitiés de phrases en accrocs, jusqu'au patelin des frontistes d'extrème connerie.
Là, pendant qu'elle piquait un somme au coin d'un arbre, l'Artois lui fit la peau, avant de lui faire les poches lors d'un procès.
Oui, elle aurait du y voir un signe, ou au moins deviner qu'on lui balancerait des tomates quand elle crierait à l'injustice, à l'infamie et mort aux cons.
Elle avait bien vu venir le coup du je m'en vais te ramener par la peau des fesses, mais les tomates, ah ça non.
...c'est donc ainsi qu'à l'heure où nous écrivons, la hanche brisée, mortifiée, venin liquéfié, le poison croupît dans une chambre sordide, , faite de bois cambraisien, aux meubles cirés, de draps de flanelle bleue et aux tentures lisses.
Les yeux rivés aux poutres, ornées d'une corde raide.
*Traduction navasienne : nom d'un foutreciel!
A l'aller elle se trouvait simplement témoin. Témoin d'un rescapé, à demi éclopé, elle aurait du y voir un signe, en bon augure. Mais non, simple procédure, laissez passer et tout le tintouin, sans-papiers, tu fous le camp de là. Ici, on prône "l'identité ducale".
Moui, bon, après tout on ne fait que passer, et...c'est ce que fit le blond.
Il passa...
Pas d'anguilles en Flandres, que des morues, et quelques carpes pleines d'arêtes. Tout un programme pour le poison brugeois, qui ne demandait qu'à jeter ses filets dans le lac, pour y pêcher quelques écailleux. Elle les viderait à loisir, et si elle n'y verrait pas l'avenir, au moins les ferait-elle rôtir, au feu de bois.
Et c'est qu'il en tomba des carpes, des bouches rondes ouvertes, mâchoires en extension et yeux exorbités, il en pleuvait dans chaque ruelle de Flandres. Et des murmures aussi.
Crénom d'un chien*, l'empoisonneuse est de retour!
Quelques uns fuyaient, d'autres se signaient, et les Loreals se marraient.
Bruges avait un peu la saveur d'une friandise. Plaisante, douce au palais et familière.
Le chauve au cheveu unique, les Vygnards que l'on rêvait de pendre, des voisines loréaliennes aux contes de quatre sous, et des morues fraîchement débarquées qui n'attendaient que le venin du poison pour paralyser leurs convulsions désespérées.
Il n'y manquait qu'un parfum de folie ordinaire, un atome d'évidence qui avait bel et bien disparu.
Mais la Venise du Nord attirait toujours. Aventuriers de pacotilles, ou candidats au suicide. Le lac était froid en cette saison, l'on pouvait s'y noyer, ou s'y geler le sang, au choix.
Restait la corde aussi.
Parfait instrument de libération pour un sybarite piégé jusqu'aux os, par une brune grosse jusqu'au cou.
Tout ce que voulait le poison, c'était le trésor promis par la pancarte. Et puis ces deux qui rôdaient là constamment. Forcément, ils avaient du trouver le magot.
D'entrée, elle annonça la couleur.
"Filez moi l'or, où crachez l'endroit de la planque". Même pas eu à menacer, que le brun lui indiqua où creuser.
S'il mentait, elle lui ferait payer, qu'elle répondit.
Et lui qui souriait, même pas peur. Elle en aurait été vexée, s'il n'avait eu l'art d'accommoder le poison.
Prise à contrepieds, à défaut d'être pendue par ces mêmes pieds, elle n'en menait pas large. Elle coulait dans ses veines avec la plus odieuse des sournoiseries, grisée par la grisaille elle-même, qui riait de son âme noire, enivré sans doute par un cinglant m'enfoutisme, ou juste fou.
Bruges abritait en son sein un empereur, et son futur chiard.
Elle en était arrivée à cette constatation, se demandant comment elle s'était débrouillée pour se foutre dans pareille équation. Elle avait beau s'inspecter la carne, pas de x, ou de carré collé au cul.
Mais bon sang!
Elle était là la réponse!
Au hasard d'un croisement, plutôt en V qu'en croix, ils firent un bout de route ensemble, de moitiés de phrases en accrocs, jusqu'au patelin des frontistes d'extrème connerie.
Là, pendant qu'elle piquait un somme au coin d'un arbre, l'Artois lui fit la peau, avant de lui faire les poches lors d'un procès.
Oui, elle aurait du y voir un signe, ou au moins deviner qu'on lui balancerait des tomates quand elle crierait à l'injustice, à l'infamie et mort aux cons.
Elle avait bien vu venir le coup du je m'en vais te ramener par la peau des fesses, mais les tomates, ah ça non.
...c'est donc ainsi qu'à l'heure où nous écrivons, la hanche brisée, mortifiée, venin liquéfié, le poison croupît dans une chambre sordide, , faite de bois cambraisien, aux meubles cirés, de draps de flanelle bleue et aux tentures lisses.
Les yeux rivés aux poutres, ornées d'une corde raide.
*Traduction navasienne : nom d'un foutreciel!