Jehanne_elissa
Une auberge sur les routes de Bourgogne. La nuit est déjà bien avancée et le ciel est dencre. Les nuages dansent avec la lune, jouent un jeu quils aiment, ils se cherchent, ils se trouvent, ils la masquent, ils la dévoilent, belle et ronde, aux yeux des badauds et des gens ne trouvant le sommeil. Lhiver est là et lhiver est froid un léger vent fait bruisser les feuilles, spectatrices du jeu de séduction entre les habitants de ce grand ciel noir. La campagne dort elle aussi, des chevaux montés par des cavaliers vêtus de couleurs sombres passent à proximité de lauberge réveillant certainement de pauvres lapins. Pauvres lapins qui dormaient paisiblement
Et oui, cest le genre de chose que peut penser la Goupil au beau milieu de la nuit.
Elles étaient arrivées depuis peu avec leurs compagnons de voyage, elles avaient trouvé du monde connu et chérit aux abords de Châlons mais continuaient leur route : lobjectif restait les terres de Malpertius. Pour la première fois la Volpilhat allait découvrir ses terres Bourguignones et plus les jours passaient, plus leur convoi avalait les kilomètres, plus elle était pressée, impatiente. Lhistoire des Volpilhat était née ici, dans cet écrin quest la Bourgogne, en ces terres, en cette Baronnie qui était presque autant évocatrice de ses origines que ses cheveux roux. Elle qui depuis aussi loin que remontent ses souvenirs avait fait de son nom et de son héritage les pierres angulaires de sa vie allait enfin mettre ses petits pieds fins au cur même de son histoire. Et ça la ronge, ça la ronge, ça lhabite ! Elle voudrait déjà y être, elle est autant excitée que pour le couronnement de la Reine, autant excitée que pour le début des festivités passées à Cauvisson. Dailleurs peut-être quelle pourrait y organiser des festivités, ici aussi, une fois habituée aux lieux Non, non, ce nest pas lheure de penser à ça. Elle ferme les yeux. Il faut dormir.
De nouveaux cavaliers font une embardée près de lauberge. Elle ouvre les yeux. Ils ne lont pas réveillée non elle est excitée comme une puce nous lavons dit, tellement que le sommeil la boude. Ils seront un prétexte quand lon sinquiétera au matin de ses cernes qui saccentuent de jours en jours elle dira que les routes de Bourgogne sont trop empruntées la nuit et que les voyageurs sont la cause de son mauvais sommeil ; et pour sexcuser de ce mensonge auprès de ces gens quelle ne connaît pas elle ira prier ensuite, peut-être même quelle sautera un repas pour faire don de nourriture aux pauvres. Un soupir vient troubler le calme de la chambre, elle se tourne brusquement sur le côté avant darrêter son mouvement dun coup sec. Elle avait presque oublié, perdue dans les pensées dévergondées et exubérantes de linsomnie, quelle dormait avec son amie. Peu de chambres. Elle aurait pu se vexer et sénerver, mais non, bien sur que non, plus quune Vicomtesse elle est une adolescente qui ne voit que trop peu sa meilleure amie en ce moment.
Et à y bien penser cela faisait maintenant un beaucoup trop long moment que les deux jeunes filles narrivaient à passer du temps ensemble. Avant cétait jamais lune sans lautre, toujours fourrées au même endroit au même instant, lune à côté de lautre, presque siamoises et les séparer ne serait-ce quune journée provoquait un vrai drame. Mais ça, cétait avant. Quand avaient-elles commencé à passer moins de temps ensemble ? Elle fronce les sourcils. Eilinn avait maintenant des obligations à Paris et puis le temps avait fait son uvre tout simplement : elles grandissaient donc vaquaient, chacune de leur côté, aux occupations dont elles voulaient faire leur vie. Rien de grave en ça La tête se tourne furtivement vers son amie. Le cur de la jeune Goupil se serre à la vue des cheveux noirs balayant ses azurs paisiblement fermés : même si elles étaient moins souvent ensemble elle aimait toujours Eilinn, si ce nest plus quavant encore.
Non, la vie avait simplement suivi son cours et la distance nabimait en rien son amitié. En cherchant bien elle pouvait voir des raisons aux changements. La mort dAléanore avait put être une légère rupture. La violence de la scène, la violence des images, lodeur de sang et surtout le mensonge qui avait précédé cette mort avait été une blessure pour chacune delles, renforçant les caractères, rendant plus affreuse encore réalité, la vraie vie qui nétait pas le monde dans lequel vivait Jehanne Elissa. Peut-être que la jeune Goupil sétait aussi, sans le vouloir mais par protection tout ce quil y a de plus animale, retranchée, éloignée, après avoir appris que son père nétait pas mort. Peut-être oui, certainement même, elle avait passé un bon mois cloîtrée à Cauvisson. Elle soupire et regarde à nouveau la lumière de la lune qui filtre dans la chambre.
Elle déglutit. Ou alors tout était entièrement sa faute. En acceptant, à la fin des festivités de Cauvisson, lengagement auprès du Comte de Scye elle avait rompu le lien qui les rendait indissociables, elle avait été la première à les éloigner et Oh ventre qui se serre, oh nud dans la gorge. Cétait sa faute ! Oh depuis combien de temps voulait-elle en parler à son amie ? Elle se redresse et sassoit sur le lit. Non pas maintenant, cest le milieu de la nuit, tu as assez attendu un jour de plus ne sera pas si grave Mais si cétait ça. Si cétait ça la raison ? Elle se mord nerveusement la lèvre inférieure. Elle est comme ça la rouquine, elle doit faire les choses, elle est comme ça, elle a déjà trop attendu, repoussant à un moment propice, à un moment dintimité. Mais là elle le sent, elle ne peut plus. Elle na jamais vraiment du faire preuve de patience au fond cest là le problème des jeunes ayant grandit dans une certaine facilité. Mais ne serait-ce pas terriblement égoïste de briser le sommeil de son amie pour vider son sac chose quelle seule avait repoussé ? Devait-elle lui faire payer sa lâcheté ? La tête se penche vers la droite et elle regarde son amie. Son visage se tord en une étrange grimace comme si elle se préparait à recevoir un coup de coussin ou une remarque cinglante, après tout, ça serait mérité.
- « Eilinn ? Tu dors ? »
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Elles étaient arrivées depuis peu avec leurs compagnons de voyage, elles avaient trouvé du monde connu et chérit aux abords de Châlons mais continuaient leur route : lobjectif restait les terres de Malpertius. Pour la première fois la Volpilhat allait découvrir ses terres Bourguignones et plus les jours passaient, plus leur convoi avalait les kilomètres, plus elle était pressée, impatiente. Lhistoire des Volpilhat était née ici, dans cet écrin quest la Bourgogne, en ces terres, en cette Baronnie qui était presque autant évocatrice de ses origines que ses cheveux roux. Elle qui depuis aussi loin que remontent ses souvenirs avait fait de son nom et de son héritage les pierres angulaires de sa vie allait enfin mettre ses petits pieds fins au cur même de son histoire. Et ça la ronge, ça la ronge, ça lhabite ! Elle voudrait déjà y être, elle est autant excitée que pour le couronnement de la Reine, autant excitée que pour le début des festivités passées à Cauvisson. Dailleurs peut-être quelle pourrait y organiser des festivités, ici aussi, une fois habituée aux lieux Non, non, ce nest pas lheure de penser à ça. Elle ferme les yeux. Il faut dormir.
De nouveaux cavaliers font une embardée près de lauberge. Elle ouvre les yeux. Ils ne lont pas réveillée non elle est excitée comme une puce nous lavons dit, tellement que le sommeil la boude. Ils seront un prétexte quand lon sinquiétera au matin de ses cernes qui saccentuent de jours en jours elle dira que les routes de Bourgogne sont trop empruntées la nuit et que les voyageurs sont la cause de son mauvais sommeil ; et pour sexcuser de ce mensonge auprès de ces gens quelle ne connaît pas elle ira prier ensuite, peut-être même quelle sautera un repas pour faire don de nourriture aux pauvres. Un soupir vient troubler le calme de la chambre, elle se tourne brusquement sur le côté avant darrêter son mouvement dun coup sec. Elle avait presque oublié, perdue dans les pensées dévergondées et exubérantes de linsomnie, quelle dormait avec son amie. Peu de chambres. Elle aurait pu se vexer et sénerver, mais non, bien sur que non, plus quune Vicomtesse elle est une adolescente qui ne voit que trop peu sa meilleure amie en ce moment.
Et à y bien penser cela faisait maintenant un beaucoup trop long moment que les deux jeunes filles narrivaient à passer du temps ensemble. Avant cétait jamais lune sans lautre, toujours fourrées au même endroit au même instant, lune à côté de lautre, presque siamoises et les séparer ne serait-ce quune journée provoquait un vrai drame. Mais ça, cétait avant. Quand avaient-elles commencé à passer moins de temps ensemble ? Elle fronce les sourcils. Eilinn avait maintenant des obligations à Paris et puis le temps avait fait son uvre tout simplement : elles grandissaient donc vaquaient, chacune de leur côté, aux occupations dont elles voulaient faire leur vie. Rien de grave en ça La tête se tourne furtivement vers son amie. Le cur de la jeune Goupil se serre à la vue des cheveux noirs balayant ses azurs paisiblement fermés : même si elles étaient moins souvent ensemble elle aimait toujours Eilinn, si ce nest plus quavant encore.
Non, la vie avait simplement suivi son cours et la distance nabimait en rien son amitié. En cherchant bien elle pouvait voir des raisons aux changements. La mort dAléanore avait put être une légère rupture. La violence de la scène, la violence des images, lodeur de sang et surtout le mensonge qui avait précédé cette mort avait été une blessure pour chacune delles, renforçant les caractères, rendant plus affreuse encore réalité, la vraie vie qui nétait pas le monde dans lequel vivait Jehanne Elissa. Peut-être que la jeune Goupil sétait aussi, sans le vouloir mais par protection tout ce quil y a de plus animale, retranchée, éloignée, après avoir appris que son père nétait pas mort. Peut-être oui, certainement même, elle avait passé un bon mois cloîtrée à Cauvisson. Elle soupire et regarde à nouveau la lumière de la lune qui filtre dans la chambre.
Elle déglutit. Ou alors tout était entièrement sa faute. En acceptant, à la fin des festivités de Cauvisson, lengagement auprès du Comte de Scye elle avait rompu le lien qui les rendait indissociables, elle avait été la première à les éloigner et Oh ventre qui se serre, oh nud dans la gorge. Cétait sa faute ! Oh depuis combien de temps voulait-elle en parler à son amie ? Elle se redresse et sassoit sur le lit. Non pas maintenant, cest le milieu de la nuit, tu as assez attendu un jour de plus ne sera pas si grave Mais si cétait ça. Si cétait ça la raison ? Elle se mord nerveusement la lèvre inférieure. Elle est comme ça la rouquine, elle doit faire les choses, elle est comme ça, elle a déjà trop attendu, repoussant à un moment propice, à un moment dintimité. Mais là elle le sent, elle ne peut plus. Elle na jamais vraiment du faire preuve de patience au fond cest là le problème des jeunes ayant grandit dans une certaine facilité. Mais ne serait-ce pas terriblement égoïste de briser le sommeil de son amie pour vider son sac chose quelle seule avait repoussé ? Devait-elle lui faire payer sa lâcheté ? La tête se penche vers la droite et elle regarde son amie. Son visage se tord en une étrange grimace comme si elle se préparait à recevoir un coup de coussin ou une remarque cinglante, après tout, ça serait mérité.
- « Eilinn ? Tu dors ? »
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