Isa.
Les jours succèdent aux jours qui s'allongent d'ailleurs, signe de la fin d'un hiver rude et difficile. Si les douleurs et les blessures physiques guérissent lentement, qu'en est-il de celles, plus insidieuses, qui vous déchirent le coeur et l'âme, peuplant chaque nuit d'images insoutenables ? Quand viendra le lever du jour, cette aube qui fera renaître l'espoir et donnera l'envie de se remettre en route ...
L'aube se lève, et le feu brûle toujours, les mains jamais ne se sont arrêtées de l'alimenter et les yeux de le veiller. Autour de celui-ci pourtant, elle est seule, et elle l'attend. Il arrivera un jour où l'autre, elle le sait, il le lui a écrit. Et si les mots lui ont manqués, si les doigts n'ont pu reprendre une plume que récemment, son coeur lui n'a cessé de battre plus rapidement, à la simple pensée de sa présence. Peut-être était-il proche d'ailleurs, de la façon que seul l'amour vrai et intense peu percevoir ...
Arrivera-t-il bientôt ? Et plein de projets comme à son habitude? Bavard et insouciant, ambitieux et souriant, déterminé et fonceur ? Son visage apparaît intact dans ses souvenirs. Lui qui est son seul repère, sa raison d'être, le commencement et la fin ...
Une nouvelle fournée vient de sortir et les effluves des petits pains dorés se répand dans la vaste demeure. Comme chaque jour, la vie reprend son cours, la taverne s'éveille joyeusement des palabres des premiers clients, et pour la première fois, le linge peut être étendu au soleil... Les enfants nourris s'en vont au marché avec Madeleine et Aelia, en pleine tétée, semble interroger de ses grands yeux le visage maternel...
Il sera bientôt là, ma perle ....
Les petites lèvres lachent un instant le mamelon pour esquisser un sourire, avant de reprendre le cours du repas et d'enfin fermer les yeux, apaisée peut-être par ces quelques mots. Une certitude...
Midi déjà. Le temps du repas. Débarbouillage de frimousses et de menottes avant d'installer le petit monde à la table familiale ... au bout de laquelle trône le grand siège ... vide. L'appétit est de moins en moins présent et pour la quatrième fois en deux heures, ses pas la mènent vers le grand porche,entre jusqu'au milieu de la rue. Le soleil tape et l'éblouit, forçant la brune à faire de sa main un pare-soleil. Quelques silhouettes traversent la rue, au loin .... mais une seule d'entre elles retient son attention ...
Quelques pas, incertaine encore. Ne pas se réjouir trop vite.... Quelques pas encore, plus rapides cette fois... se pourrait-il ?... Cette fois elle court, le coeur au triple galop ... plus que quelques toises et ses bras enfin la reçoivent.
Amour !!!... Mon ange ... enfin ....
Les mots se font souffles, puis baisers et étreintes, bras qui entourent cette taille bien trop maigre et attirent le corps vouté. Azurs scrutant le visage aux joues presque creuses, et au regard ... éteint ? Elle n'avait pas imaginé qu'il puisse avoir changé à ce point et déjà l'inquiétude se mêle au bonheur de le retrouver enfin. Alors elle l'enlace et le guide doucement vers leur maison. Elle, si petite, mais aujourd'hui plus que jamais forte pour deux...
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