Theognis
Étalé sur la route comme une flaque de sang, Théo sentait qu'on le dépouillait de sa cape rouge mitée par les saisons. Que pouvait-il y faire? La tête aplatie contre le sol, un demi-oeil ouvert comme repère ultime de sa conscience, il bavait sa défaite comme un escargot en miettes.
C'est qu'on le foutait à poil, mort de diou! La colère tournait en sa cervelle comme un rat dans une boîte. En vain. Les mains noueuses du nain s'occupaient désormais de ses bottes, de ses braies, de sa chemise même, sans prendre beaucoup d'égards pour le déshabiller. Jamais un homme ne l'avait dévêtu, de cette manière ou d'une autre. L'expérience ne mériterait pas un autre essai.
Elles le lâchèrent enfin. les mains, pas ses pensées. Un air frais lui chatouillât le dos. La brise du printemps sur sa peau nue. Il était à poil, complètement, comme au premier jour de sa foutue naissance et à peine moins sale et gémissant.
Dans son champ de vision, entre le brin d'herbe et un caillou rond, il aperçut le nabot, tout chargé de ses frusques, s'éloigner sans faire plus attention au baron. Celui-ci mit à profit ce moment de répit. Rassemblant ses forces, il se prépara à l'action. Qu'on le vole son or et ses miches de pain, passe encore. Mais son épée rouillée, ses vêtements usés, jamais!
Avec tout l'élégance du ver de terre rose qu'il était devenu, il roula jusqu'au fossé, et tomba dans le marigot, la tête la première. Le contact de l'eau fraîche lui fit du bien, le réveilla un peu. Il espérait être dissimulé aux yeux des brigands, lesquels s'attaquaient désormais, d'après le bruit ambiant, aux filles du chariot.
Le corps ployé en deux, pratiquement accroupi, il progressa tant bien que mal en direction des charrettes des vilains. Le nain s'occupait de jeter les vêtements dans la remorque, sans s'occuper du reste. Caché dans les hautes herbes, Théo se demandait comment agir, quand il vit son épée posée contre le tronc d'un arbre. Sa chance était là!
Il jaillit des fourrés comme un beau diable, nu comme un ange, oubliant sa douleur dans un cri de guerre qui ressemblait peu à prou à:
Rhaaaaa, tournes-toi le nain, que je t'estourbisse!
Le Baron n'oubliait jamais son subjonctif, même en bataille, même à poil. S'emparant de son épée, il se mit en garde pour frapper le nain, décidé cette fois à ne pas se laisser surprendre. Et à le tailler en allumettes, par la même occasion.
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C'est qu'on le foutait à poil, mort de diou! La colère tournait en sa cervelle comme un rat dans une boîte. En vain. Les mains noueuses du nain s'occupaient désormais de ses bottes, de ses braies, de sa chemise même, sans prendre beaucoup d'égards pour le déshabiller. Jamais un homme ne l'avait dévêtu, de cette manière ou d'une autre. L'expérience ne mériterait pas un autre essai.
Elles le lâchèrent enfin. les mains, pas ses pensées. Un air frais lui chatouillât le dos. La brise du printemps sur sa peau nue. Il était à poil, complètement, comme au premier jour de sa foutue naissance et à peine moins sale et gémissant.
Dans son champ de vision, entre le brin d'herbe et un caillou rond, il aperçut le nabot, tout chargé de ses frusques, s'éloigner sans faire plus attention au baron. Celui-ci mit à profit ce moment de répit. Rassemblant ses forces, il se prépara à l'action. Qu'on le vole son or et ses miches de pain, passe encore. Mais son épée rouillée, ses vêtements usés, jamais!
Avec tout l'élégance du ver de terre rose qu'il était devenu, il roula jusqu'au fossé, et tomba dans le marigot, la tête la première. Le contact de l'eau fraîche lui fit du bien, le réveilla un peu. Il espérait être dissimulé aux yeux des brigands, lesquels s'attaquaient désormais, d'après le bruit ambiant, aux filles du chariot.
Le corps ployé en deux, pratiquement accroupi, il progressa tant bien que mal en direction des charrettes des vilains. Le nain s'occupait de jeter les vêtements dans la remorque, sans s'occuper du reste. Caché dans les hautes herbes, Théo se demandait comment agir, quand il vit son épée posée contre le tronc d'un arbre. Sa chance était là!
Il jaillit des fourrés comme un beau diable, nu comme un ange, oubliant sa douleur dans un cri de guerre qui ressemblait peu à prou à:
Rhaaaaa, tournes-toi le nain, que je t'estourbisse!
Le Baron n'oubliait jamais son subjonctif, même en bataille, même à poil. S'emparant de son épée, il se mit en garde pour frapper le nain, décidé cette fois à ne pas se laisser surprendre. Et à le tailler en allumettes, par la même occasion.
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